« Alcool et santé : attention aux abus »
Les Echos observe : « L’alcool mauvais pour la santé ? Pas si simple, répond le Pr Didier Raoult, qui passe en revue point par point ses effets positifs ou négatifs ».
Dans sa chronique pour le journal, le Pr Raoult remarque en effet que « nous assistons à un déchaînement de déclarations autour de l’alcool qui témoigne d’un regain récurrent de puritanisme ».
Il rappelle que « les conséquences de la consommation d’alcool sont multiples, dont l’ivresse, qui peut être associée aux accidents de la route, aux accidents domestiques et aux rixes, du fait de son effet désinhibant. L’alcool a aussi un effet contre l’angoisse, et l’on a montré récemment que ses récepteurs étaient proches de ceux des anxiolytiques ».
Le médecin relève en outre que « la consommation chronique d’alcool est associée à un certain nombre de pathologies atteignant le foie (cirrhose et cancer), mais c’est loin d’être le seul facteur déclenchant ces maladies. L’obésité et la consommation de fructose sont à l’origine de plus de cirrhoses et de cancers du foie aux Etats-Unis que l’alcool, et la principale cause de cirrhose et de cancer du foie dans le monde est liée aux infections par les virus des hépatites B. Par ailleurs, ces atteintes hépatiques peuvent aussi avoir une origine génétique (hémochromatose) ».
Le Pr Raoult souligne qu’« avec l’alcool, tout est question de quantité. Si une intoxication massive à l’alcool peut favoriser les démences, il est apparu clairement depuis 40 ans qu’une consommation modérée avait un effet préventif sur les pathologies cardio-vasculaires et les accidents vasculaires cérébraux. Il existe d’ailleurs un parallélisme frappant entre la consommation moyenne d’alcool d’un pays et la longévité de sa population : il se trouve que les pays où l’on consomme de l’alcool de façon régulière sont aussi ceux dans lesquels l’espérance de vie est la plus élevée ».
Le médecin ajoute que « cet écart s’explique par de multiples facteurs sans rapport avec la boisson, de la même manière que les pathologies liées à l’alcool sont elles-mêmes multifactorielles. Mais, si l’on compare de façon neutre les causes de mortalité associées à (et non pas causées par) l’alcool, entre les pays qui en consomment peu et ceux qui en consomment plus, on constatera que la surmortalité se retrouve seulement dans les pathologies liées à l’ivresse, inexistantes dans les pays où l’alcool est prohibé », conclut-il.
Date de publication : 15 octobre 2018
« Pas d’écrans avant 3 ans : un enjeu de santé pour Agnès Buzyn »
Agnès Leclair relève qu’hier, « la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a reconnu qu’on ne pouvait ignorer les risques qui pesaient sur les tout-petits exposés aux écrans ».
La ministre a déclaré : « Les analyses ont démontré que la multiplication rapide des écrans, couplée à leur utilisation généralisée, quotidienne et souvent prolongée, peut avoir des conséquences sur le développement du cerveau des jeunes enfants, sur leur apprentissage des compétences fondamentales comme le langage ou encore sur leur capacité de concentration ».
Agnès Leclair note que « certaines analyses ont également pointé «des effets néfastes sur la santé physique des enfants» comme des «troubles du sommeil», des «troubles de la vision» ou des «risques d’obésité liés à la sédentarité», a ajouté Agnès Buzyn.
La journaliste observe qu’« invitée par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), qui fêtait les dix ans de sa campagne «pas d’écrans avant trois ans», la ministre en a salué la reconduction ». Agnès Buzyn a souligné : « Nous voyons aujourd’hui combien cette alerte était nécessaire et combien cet enjeu est toujours d’actualité ».
Agnès Leclair rappelle ainsi : « Tablette, smartphone, ordinateur… Les foyers comptent désormais cinq écrans en moyenne. Le CSA a édité une brochure de conseils sur leur utilisation par les enfants et les adolescents, qui sera distribuée chez les médecins, dans les centres de Protection maternelle et infantile (PMI) ou encore dans les crèches… ».
Agnès Buzyn a en outre évoqué « son souhait de muscler «les constats scientifiques rigoureux qui doivent nous guider sur la question des usages des écrans par les enfants». Une mission qu’elle a confiée cet été au Haut Conseil de la santé publique », indique la journaliste.
Date de publication : 19 octobre 2018
« Mes démons vont ressurgir »
Estelle Mari livre le témoignage d’Estelle, qui « à 28 ans, grâce au baclofène, (…) avait réussi à « se foutre de l’alcool », cette dépendance qui lui collait au corps depuis son adolescence festive ». La jeune femme « comme d’autres patients, n’est pas satisfaite de l’autorisation accordée au baclofène hier » et s’inquiète : « Quelle va être la suite de ma vie ? Si on baisse mes doses, je le sais, mes démons vont ressurgir », affirme-t-elle.
« Après dix années d’espoir et de controverses, l’Agence du médicament (ANSM) a enfin autorisé la mise sur le marché de ce myorelaxant, à la base un décontractant musculaire, pour traiter l’alcoolisme mais… à dose réduite : pas plus de 80 mg par jour. Insuffisant pour Estelle, qui avale 300 mg au quotidien », explique la journaliste. « Une quantité vitale, le prix du bonheur », estime la malade. « Réduire sa dose ? Elle a déjà essayé, vite renoncé », poursuit l’article. « Je ne veux pas y penser, à chaque fois, mes tendances addictives revenaient. Mes médecins me répètent qu’on ne change pas une équipe qui gagne », répond-t-elle.
Selon Thomas Maës-Martin, président du collectif Baclohelp, qui regroupe des malades, des familles et des médecins : « plus de 40 000 patients prennent du baclofène en France, dont la moitié à 140 mg par jour, en moyenne ! Beaucoup ne pourront plus se soigner. Nous sommes sidérés, s’indigne-t-il. D’autant que ce produit qui était autorisé depuis 2014 grâce à une recommandation temporaire d’utilisation n’était jusque-là pas limité en quantité ». « L’association compte riposter et attaquer cette décision devant le Conseil d’Etat », annonce Le Parisien.
« Ce médicament n’est pas anodin et doit être manié avec beaucoup de précautions. A plus de 180 mg par jour, le risque de décès est plus de deux fois supérieur aux autres traitements contre l’alcoolisme », explique l’ANSM. « Ainsi le baclofène, qui sera vendu sous le nom de Baclocur, devra être prescrit en dernier recours. Mais, selon l’ANSM, les dosages pourront évoluer « en fonction des études à venir » », conclut Le Parisien.
Date de publication : 24 octobre 2018
« La psychiatrie française en déshérence »
« Profession peu attractive, pathologies mal connues du grand public, manque de moyens… La psychiatrie s’enfonce dans la crise, et les mouvements dans les hôpitaux se multiplient », alerte Soline Roy dans Le Figaro
« Ça craque de partout », assure la journaliste. « À Amiens, l’hôpital Pinel s’enfonce dans la crise ; au Rouvray (Seine-Maritime), le personnel a obtenu l’ouverture de postes après une longue lutte, mais peine à recruter ; à Saint-Étienne, les médecins démissionnent les uns après les autres ; à Paris, les syndicats de trois hôpitaux psychiatriques, dont l’emblématique Sainte-Anne, protestent contre une fusion qui leur est imposée », détaille-t-elle.
Partout, les professionnels de la santé mentale « sont épuisés et n’ont pas les moyens de dispenser des soins de qualité. Quant aux malades, ils arrivent aux soins très tard, et l’accès aux traitements adaptés ne leur est pas toujours assuré », résume le Pr Marion Leboyer (responsable du pôle de psychiatrie et d’addictologie de l’hôpital de Créteil et directrice de la fondation FondaMental). « Elle est l’auteur, avec le Pr Pierre-Michel Llorca (CHU de Clermont-Ferrand), d’un ouvrage sans concession sur l’état de la psychiatrie française (Psychiatrie : l’état d’urgence, Fayard) », précise l’article.
« Depuis des années, les rapports s’accumulent et trois plans santé mentale (en 2001, 2005-2008 et 2011-2015) se sont succédé. Mais la situation continue à se dégrader », souligne Le Figaro.
« La psychiatrie publique est devenue un enfer. [Elle] appartient aujourd’hui aux gestionnaires, aux économistes de la santé, aux juges, aux laboratoires pharmaceutiques, aux professionnels du fait divers, aux politiques… Qu’on laisse une place à ceux qui en ont fait leur métier », s’écriait en juin le Dr Daniel Zagury, du centre psychiatrique du Bois de Bondy (Seine-Saint-Denis).
« Pour sortir les malades des hôpitaux, on a supprimé 50% des lits en 30 ans, sans que les moyens alloués au suivi en ambulatoire ne suivent », regrette le Dr Jacqueline Goltman, psychiatre et vice-présidente du syndicat de médecins UFML-S. « Obtenir un lit en urgence devient un défi », souligne la journaliste.
Tous constatent que « les patients arrivent au soin de plus en plus tard, avec une perte de chance d’autant plus inacceptable » que, « s’ils sont pris en charge assez tôt et reçoivent la bonne stratégie thérapeutique, on sait que toutes pathologies confondues, environ un tiers des patients va guérir, et un autre tiers ne gardera que des symptômes résiduels », précise le Pr Leboyer.
« Côté recherche, la situation n’est guère plus brillante. Des avancées significatives ont pourtant été faites sur la compréhension des maladies mentales, notamment leurs composantes génétiques et environnementales », poursuit Le Figaro. « «Nous sommes à la veille de très grands progrès», assure le Pr Leboyer. Mais en 2011, la Cour des comptes alertait sur «une sous-dotation persistante de la recherche» en psychiatrie. 2% seulement du budget public de la recherche en santé lui sont alloués, selon une étude de 2013, contre 7% en Grande-Bretagne et 16% aux États-Unis », rapporte la journaliste.
Par ailleurs, « la France ne dispose que de très peu de données pour objectiver le poids des maladies mentales, leur répartition géographique, les classes d’âge les plus sévèrement touchées ou l’influence des facteurs sociaux et environnementaux. De là à conclure que notre pays met en place des politiques dépourvues d’outils de pilotage fiables […], il n’y a qu’un pas », écrivent Marion Leboyer et Pierre-Michel Llorca.
« La France ne manque pas de spécialistes avec une moyenne de 22,8 psychiatres pour 100.000 habitants, bien plus que la moyenne des pays de l’OCDE (15,5). Mais cela cache d’importantes disparités territoriales : selon la Drees, la Vendée en compte ainsi 9,3 pour 100.000 habitants, lorsque Paris arbore un impressionnant 97,8 ! De plus, près de 30% des 12.591 praticiens recensés par l’Ordre des médecins en 2016 avaient plus de 60 ans. Du côté des étudiants, la psychiatrie fait partie des 5 disciplines les moins bien classées dans les choix des futurs internes (…). Et l’hôpital peine à recruter : plus de 28% des postes de praticien hospitalier n’avaient pas trouvé preneur en 2017 », rapporte Le Figaro.
« Du côté du grand public, la connaissance des maladies mentales est parcellaire et entachée de préjugés. Et la frontière est floue entre le psychiatre, qui est médecin, le psychanalyste dont la formation n’est pas sanctionnée par un diplôme d’État, le psychologue clinicien, et divers «psychothérapeutes» aux compétences mal connues. Grand flou également entre les techniques de soins proposées. Quant à la non-prise en charge des consultations auprès d’un psychologue par l’Assurance-maladie, elle bloque l’accès des moins aisés aux traitements », explique l’article.
« Le coût des pathologies psychiatriques mériterait pourtant que l’on s’y penche de plus près. Une étude publiée en 2012 par la fondation FondaMental et l’Unité de recherche clinique en économie de la santé (URC-Eco) l’estimait à 109 milliards d’euros (13,4 milliards pour les hospitalisations, consultations et médicaments, 6,3 pour le coût médico-social, 24,4 en pertes de productivité et, enfin, 65 en perte de qualité de vie). De son côté, l’Assurance-maladie consacrait en 2016 quelque 23 milliards d’euros aux maladies psychiatriques et à la consommation de psychotropes, soit 15 % de ses dépenses totales », détaille la journalise. « Cela fait des maladies mentales le 1er poste par pathologies, devant les maladies cardio-vasculaires et les cancers », souligne-t-elle.
Concernant le plan santé présenté, mi-septembre, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn : « C’est une politique des petits pas », déplore le Pr Leboyer, qui réclame pour la psychiatrie « l’équivalent de l’Inca pour le cancer ». « L’OMS estime qu’en 2020, les maladies mentales seront la première source de handicaps. C’est un enjeu du XXIe siècle ! », insiste le spécialiste.
Date de publication : 25 octobre 2018
« Les « fake news » peuvent-elles menacer votre santé ? »
Le Figaro publie un texte de Caroline Faillet, « spécialiste du décodage de l’influence numérique », qui observe que les « fake news » « font l’objet d’un projet de loi en discussion à l’Assemblée. Mais au-delà du seul domaine politique, ces fausses nouvelles contaminent notre vie quotidienne, en particulier la santé où, à force de brouiller les pistes entre fausses peurs et vrais risques, elles peuvent avoir de graves conséquences ».
La spécialiste rappelle qu’« en anglais, le terme ne désigne pas un article faux, au sens d’inexact, mais plutôt un faux article, une publication qui se fait passer pour un article de presse sans en être un. C’est le moyen préféré des pros de l’intox pour générer des revenus publicitaires, et plus la « fake news » est grossière et alarmiste, plus elle est lue, partagée et rémunératrice ».
Elle souligne : « Plus grave, certains chercheurs n’hésitent pas à enfreindre les règles scientifiques par pur intérêt : idéologique, pour défendre une cause ; de carrière, en vertu du fameux diktat «publish or perish» (publier ou mourir) ; financier, pour cautionner une association, un groupe industriel, une administration, un groupe de pression ; intellectuel, pour conforter ses propres publications tout en les sachant contestables ».
« C’est devenu d’autant plus facile que des éditeurs peu scrupuleux lancent sur le Web des revues prétendument scientifiques en accès libre qui, sous un nom à consonance scientifique, valident ces études bidon moyennant finances, au risque de créer la confusion avec les revues sérieuses. La recherche est aujourd’hui prise à son propre piège de course à la publication ; c’est à elle de réfléchir aux moyens de mettre un terme à des dérives qui risquent d’entacher pour longtemps l’expertise scientifique », continue Caroline Faillet.
Elle indique que « les faussaires ont trouvé l’outil idéal de diffusion massive. Conçues pour capter notre attention, des plateformes comme Google, Facebook et Twitter se nourrissent de ces contenus en «prêt à partager» pour créer des communautés en rassemblant des personnes qui ne se reconnaissent plus dans le système ».
« Dans la santé, profitant du climat de défiance qui s’est installé entre le public et le corps médical, de véritables prédateurs manipulent ainsi les plus vulnérables. D’après l’INCa (Institut national du cancer), 60% des personnes traitées pour un cancer prennent des remèdes naturels en plus de leurs traitements. Et les 10 millions de malades chroniques, qui supportent mal des traitements contraignants à vie, sont des proies de choix pour des recettes alternatives et autres médecines parallèles », souligne la spécialiste.
Caroline Faillet remarque qu’« endiguer ces réseaux dans un système libre et ouvert par définition est illusoire. L’information n’est plus l’apanage des journalistes professionnels. Aujourd’hui, n’importe qui peut produire le contenu qu’il veut et s’arranger pour le faire référencer en tête des moteurs de recherche, loin devant les sites vitrines institutionnels que les internautes ne croiseront jamais en naviguant sur Internet. C’est aux experts et aux autorités sanitaires de s’approprier davantage les outils numériques pour contrer la désinformation en répondant réellement aux peurs et attentes du public ».
La spécialiste souligne en outre que « nous pouvons tous être manipulés, et les plus éduqués n’échappent pas aux « fake news », au point d’être souvent les premiers à relayer les discours de défiance envers la science. […] La résistance à l’intox exige un effort citoyen pour apprendre à retrouver l’esprit critique à travers la rhétorique et la dialectique. Il est urgent de réhabiliter dès le plus jeune âge l’éducation à ces matières, plus que jamais d’actualité dans cette nouvelle agora qu’est devenu le Web ».
Date de publication : 29 octobre 2018
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