« En psychiatrie, on attache et on isole, faute de personnel »
C’est ce que constate Eric Favereau dans Libération. Le journaliste relève ainsi que « dans un récent courrier au ministère de la Santé, la contrôleuse générale des lieux de privation et de liberté exhortait une nouvelle fois à ce que soient revues les pratiques françaises en matière d’isolement et de contention dans les services de psychiatrie. Pour le Conseil constitutionnel, un juge des libertés devrait être impliqué ».
Eric Favereau explique que « le 7 décembre dernier, après une nouvelle visite de ses services à l’hôpital d’Aulnay, la Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, Dominique Simonnot, a écrit ainsi une lettre sévère au ministre de la Santé, Olivier Véran. Outre le fait qu’elle souligne que les droits à l’information des patients ne sont toujours pas respectés, elle s’inquiète, encore et encore, des pratiques d’isolement et de contention ».
« «Ces pratiques se font sans décision médicale», et l’isolement peut être «maintenu pendant plusieurs jours sans corrélation avec un état clinique qui le justifie, alors que les observations horaires des infirmières rapportent de façon continue le calme du patient». Ou encore : «En toute illégalité, le registre d’isolement et de contention n’est pas tenu ou l’est de manière aléatoire.» Et enfin, cette remarque : «Les pratiques d’isolement et de contention sont exercées dans des locaux indignes.» Et Dominique Simonnot de demander au ministre de «prendre immédiatement les mesures nécessaires» », note le journaliste.
Il s’interroge : « Que va-t-il se passer ? Le ministre va-t-il répondre ? On peut en douter. Ces jours-ci tout paraît figé. Se joue, en effet, un bras de fer entre le ministère et les différents syndicats de psychiatres autour d’un décret qui devrait sortir sur l’intervention du juge des libertés dans les pratiques d’isolement et de contention ».
« Le Conseil constitutionnel a en effet décidé que comme ces pratiques mettent en cause les libertés individuelles, le législateur se devait de faire intervenir le juge des libertés. En réponse, le gouvernement a fait voter en septembre un amendement mettant le juge dans la boucle, mais de façon peu contraignante », remarque Eric Favereau.
Dominique Simonnot observe que « la réforme proposée pour encadrer l’isolement et la contention est au plus bas niveau de l’échelle. Le gouvernement a fait le choix d’une saisine du juge qui n’est pas automatique. La procédure n’est en rien contraignante. C’est juste une possibilité ».
« Le texte prévoit également que c’est au médecin de prévenir le juge qu’une mesure d’isolement ou de contention est en cours [dans le cas où celle-ci va être renouvelée au-delà d’une certaine durée, ndlr] et le juge pourra alors se saisir d’office. Mais c’est notoirement insuffisant », poursuit-elle.
Eric Favereau ajoute que « les psychiatres disent que l’on va trop loin. Ou surtout trop vite. Tous les syndicats viennent en effet d’adresser une lettre au ministre de la Santé sur l’impossibilité de faire appliquer cette loi, mettant avant le manque de moyens de la psychiatrie publique ».
« Que va-t-il se passer ? Entre le manque de moyens, et le côté peu contraignant du décret, on peut redouter que les mauvaises pratiques perdurent », observe le journaliste.
Date de publication : 2 mars 2021
Covid-19 : « Derrière les statistiques mortifères, il y a des familles brisées »
Libération constate que « depuis le début de la pandémie, au moins 90.315 personnes sont mortes du Covid-19 en France. Au-delà des chiffres, les proches des victimes appellent à limiter les lourdes contraintes sanitaires qui entourent les personnes en fin de vie et les défunts pour faciliter ce «deuil impossible» ».
Le journal souligne ainsi : « Des disparus, au sens strict. Des morts du Covid qu’on n’a souvent pas pu accompagner, revoir, ni même honorer. Pour nombre de familles, l’épidémie est d’abord un drame intime, souvent invisibilisé un an après le début du premier confinement national. Un «deuil impossible» dit même Julie Grasset, dont le père mort du Covid dans son lit le 25 mars 2020 a été incinéré 5 heures plus tard sans qu’elle ait pu voir sa dépouille ».
Le quotidien évoque notamment l’association Victimes du Covid-19, qui se bat « pour qu’un hommage national soit rendu aux défunts de la pandémie », mais note que « beaucoup des endeuillés du Covid se réfugient dans le silence ».
Libération précise que « le gros des traumatismes remonte à la première vague ». Marc Dupont, directeur adjoint des affaires juridiques de l’AP-HP, déclare : « On ne savait alors rien du virus et de sa contagiosité. La mortalité avait brutalement explosé. Il fallait protéger les patients, les soignants comme les familles. A l’hôpital, les visites étaient suspendues dans de nombreuses unités de soins, les défunts placés tout de suite dans une housse hermétique, la toilette mortuaire impossible en chambre mortuaire et la mise en bière immédiate ».
Le quotidien relève : « Coupées de leurs proches, contraintes de se plier à l’impératif sanitaire, les familles encaissent mal ». Le Dr Thierry Baubet, responsable de la cellule d’urgence médico-psychologique de l’hôpital Avicenne (Bobigny), indique ainsi : « Ça a été épouvantablement difficile pour beaucoup surtout durant le premier confinement. Ne pas pouvoir accompagner le mourant dans ses derniers instants ni accéder au corps du mort est particulièrement difficile à comprendre et à métaboliser pour les proches. On a ouvert une ligne téléphonique à vocation régionale pour aider les endeuillés désorientés. On a distribué des flyers dans les chambres funéraires en quinze langues pour que les gens en souffrance sachent où appeler : 300 familles ont sollicité notre soutien mais on n’a pas touché les plus précaires ».
Le Dr Axel Bastien, psychiatre en charge du dispositif d’aide aux familles endeuillées du Covid mis en place par le CHR de Lille, ajoute qu’« on est encore loin d’un retour à la normale. Même si elles sont autorisées pour les fins de vie, les visites sont toujours très encadrées. Les toilettes post mortem comme les rites funéraires ne sont pas possibles et les dernières volontés des défunts ne peuvent pas toujours être respectées. La situation reste difficile pour les familles. Dans de telles circonstances, la phase de déni qui fait partie du deuil est plus marquée. On observe plus de complications que d’ordinaire. Les deuils se figent, n’évoluent pas ».
Libération remarque que « les risques Covid étant scientifiquement mieux cernés, le besoin de desserrer les contraintes sanitaires entourant les fins de vie s’est fait sentir dans les établissements hospitaliers ».
Marc Dupont précise que « depuis décembre dans les hôpitaux de l’AP-HP, si un patient décède plus de 10 jours après la date des premiers symptômes ou un test positif, il n’y a plus de housse, de mise en bière immédiate, ni de restrictions à la présentation des corps et à la toilette mortuaire ».
Date de publication : 15 mars 2021
« Les complémentaires santé vont rembourser des consultations de psychologue »
Le Parisien indique en effet que « les fédérations de mutuelles, assurances santé et institutions de prévoyance ont annoncé lundi la prise en charge de plusieurs consultations de psychologues par an. […] Un projet rendu urgent avec la crise sanitaire, alors que les troubles dépressifs sont en nette hausse ».
Le journal explique que « leurs trois fédérations ont décidé de concert de généraliser le remboursement «dès le premier euro» des psychologues libéraux, «sur orientation médicale». Pour les mutuelles, «un minimum de quatre séances par année pourra être pris en charge dans une limite de 60 € par séance», précise la Mutualité française ».
Le Parisien évoque un « même tarif pour les assureurs, qui ne s’engagent toutefois à rembourser que «jusqu’à 4 consultations» par an, indique la Fédération française de l’assurance (FFA). Les institutions de prévoyance (CTIP), spécialisées dans les contrats d’entreprises, promettent également de «renforcer leur dispositif de prise en charge des consultations de psychologues» ».
Le quotidien précise que « cette initiative n’entrera toutefois pas immédiatement en vigueur : les trois fédérations souhaitent d’abord «initier un échange» avec les syndicats de médecins et de psychologues ».
« Ces derniers ne sont pour l’heure pas pris en charge par la Sécu, même si l’Assurance maladie teste depuis 2 ans un remboursement – sur prescription du médecin traitant – dans 4 départements (Bouches-du-Rhône, Haute-Garonne, Landes, Morbihan). Un schéma encouragé par la Cour des comptes, qui recommandait dans un rapport en février de le «généraliser dès que possible» »,remarque Le Parisien.
Date de publication : 23 mars 2021
« Les dépressions sévères des salariés ont été multipliées par deux en un an »
Le Figaro observe que « le télétravail a des effets de plus en plus négatifs sur la santé, alors que le gouvernement demande aux entreprises de le privilégier au maximum. Les moins de 29 ans, qui ont peur pour leur avenir, se classent en tête des plus fragiles ».
Le journal indique ainsi qu’« un an après le premier confinement, [la] détresse psychologique [des salariés] reste importante (45%, soit près d’un sur deux), selon une étude OpinionWay […]. Si la hausse n’est que de 1 point par rapport à début avril 2020, le taux de dépression nécessitant un accompagnement quant à lui explosé (+36%). En 12 mois, les dépressions sévères ont ainsi été multipliées par… deux ».
« Des indicateurs qui inquiètent au sommet de l’État alors que la population, dans 16 départements, subit de nouvelles restrictions de liberté depuis le week-end dernier », poursuit le quotidien.
Il précise que « 63% des personnes interrogées indiquent voir de plus en plus de gens en détresse psychologique. Les moins de 29 ans se classent en tête des plus fragiles (62%), avec un risque de dépression pour 39% d’entre eux. Ces jeunes ont peur pour leur avenir et redoutent la précarité, beaucoup n’ayant pas eu le temps de bien appréhender la réalité du monde du travail. Comme de nombreux autres salariés, ils sont en perte de repères ».
« Les femmes (53%) figurent aussi parmi les catégories les plus exposées, versus 38% des hommes. Leur charge mentale, avec des contraintes à la fois professionnelles et domestiques, y contribue, quand bien même elles n’ont pas à gérer leurs enfants en journée, les écoles étant restées ouvertes contrairement au confinement du printemps 2020. En conséquence, elles sont désormais deux fois plus nombreuses à envisager de passer à temps partiel : 31%, contre 15% des hommes », continue Le Figaro.
Le journal note que « la situation des managers est également difficile, puisque 48% sont en situation de détresse psychologique. Ils font cependant preuve d’abnégation, puisque six sur dix ne parlent pas de leurs difficultés pour mieux traiter celles de leurs collaborateurs et au risque de tomber en burn-out ».
Christophe Nguyen, psychologue du travail et président d’Empreinte humaine, cabinet spécialisé sur les risques psychosociaux et la qualité de vie au travail, déclare que « des lignes d’écoute ne suffisent pas. Il faut réfléchir à aménager les mesures sanitaires du télétravail. Les gens ne vont pas tenir, c’est évident ».
Date de publication : 24 mars 2021
« Psychiatrie : avis de défaillance généralisée »
Eric Favereau indique en effet dans Libération : « Recours excessif à la contention, locaux indignes, non-respect des droits des patients… Dans une analyse de 135 rapports issus de 54 départements, l’Union nationale des familles et amis de personnes malades ou handicapées psychiques dresse un état des lieux alarmant du secteur médical ».
Le journaliste retient « une foule de petits dérapages. Ce sont des chambres d’isolement sans fenêtre, des médecins absents et qui ne contrôlent pas les pratiques. Des certificats d’hospitalisation qui sont de simples copiés-collés. Des patients enfermés, sans sortie possible, alors qu’ils sont hospitalisés librement. D’autres qui sont obligés d’être en pyjama ».
« Ce sont des mineurs avec des adultes. Des lits dans les couloirs. Des lieux fermés. C’est, au final, un monde de petits arrangements avec la loi, loin des bonnes pratiques que devrait requérir le fait de s’occuper de personnes en très grande souffrance psychique », continue Eric Favereau.
Il souligne que « ce constat était connu en partie. Des visites dans des hôpitaux psychiatriques du contrôleur général des lieux de privation de libertés ont pointé, depuis 5 ans, des dérapages. Ils pouvaient donner le sentiment de bavures, de cas à part. Mais il s’agit là d’une tout autre dimension. Car cela dérape partout, dans toute la France ».
Eric Favereau explique ainsi que « l’Union nationale de familles et amis de personnes malades ou handicapées psychiques (Unafam) vient […] de terminer un travail exceptionnel de collecte des rapports des commissions départementales de soins psychiatriques. La fonction de ces structures est simple : observer, ausculter tout ce qui se passe en termes de soins psychiatriques dans le département, avec pour mission «de veiller au respect des libertés individuelles et de la dignité des personnes hospitalisées sous contrainte en milieu psychiatrique» ».
Le journaliste observe qu’« en tout, ce sont des moments de vie de plus de 50.000 patients qui ont été ainsi observés ». Michel Doucin, administrateur de l’Unafam qui a coordonné ce travail, remarque : « On peut dire que, presque partout, il y a des violations des droits des patients, des dysfonctionnements graves ou des incohérences problématiques ».
Eric Favereau livre « un échantillon de ces mille et un petits scandales, une liste infinie à la Prévert. Il y a d’abord les locaux, souvent vétustes, souvent innommables, souvent indignes. En Seine-et-Marne, la commission a dressé les «points noirs» constatés ou signalés par les patients : «Insuffisance du chauffage, absence de serviettes de toilette, remplacées par des draps, portions de nourriture insuffisantes, qualité des repas médiocre, chambres à trois voire quatre lits, état dégradé de certaines pièces notamment des sanitaires, saleté des vitres, nettoyées trop rarement, impossibilité pour les patients d’être tranquilles dans leur chambre, difficultés d’accès aux espaces extérieurs pour les patients en fauteuil roulant, absence de sanitaires dans les chambres d’isolement.» ».
Le journaliste continue : « Il y a le temps qui coule. Des délais d’attente, sans fin, comme aux urgences. Au centre hospitalier du Forez (Loire), «le délai d’attente aux urgences est de 4 jours avec un taux d’occupation de 100% depuis le début de l’année». Et cette remarque : «Le service des urgences n’est pas adapté pour accueillir durant 3 ou 4 jours des patients psychiatriques.» ».
Il relève qu’« il y a des hospitalisations qui n’en finissent pas. Dans l’Hérault, ce cas d’école : «Un patient a quitté l’établissement après avoir passé 19 ans dans le secteur fermé, alors qu’il était en soins consentis. Il ne relevait pas d’une hospitalisation en psychiatrie, mais d’un accueil en établissement médico-social.» ».
Eric Favereau continue : « Il y a l’arbitraire. Là on isole, là non. Au centre hospitalier de Dieppe (Seine-Maritime), «les heures de début et de fin d’isolement ne sont pas renseignées, les motifs de mise en isolement ne correspondent pas à des indications thérapeutiques». Dans les Hauts-de-Seine, «à Antony et Issy-les-Moulineaux, il n’était pas clair que les décisions de mise en chambre d’isolement ou de contention prises par un interne ou par un infirmier devaient toujours être confirmées dans l’heure par la visite d’un médecin auprès du patient» ».
Le journaliste souligne en outre qu’« il y a ces droits que l’on ne respecte pas. Un non-respect global. «D’une manière générale, la lecture des dossiers de patients a permis de constater que très peu de récépissés sont signés par les patients eux-mêmes. Trop souvent, ces documents sont signés par un membre de l’équipe soignante, ce qui constituerait «une solution de facilité», pointe l’Unafam ».
Date de publication : 30 mars 2021
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