« Obèses, handicapés, malades psy… Un risque d’être moins bien soignés »
Date de publication : 8 novembre 2021
C’est ce que titre Le Figaro, qui observe que « certaines discriminations ou maladresses peuvent nuire à leur prise en charge médicale générale ».
Anne Prigent évoque ainsi « les difficultés d’accès aux soins rencontrées par des populations déjà fragilisées par leur handicap ou leur pathologie chronique ».
Le Pr Rodolphe Charles, membre du collège de médecine générale et responsable du diplôme universitaire « Accès à la santé et lutte contre les discriminations » à l’université de Saint-Étienne, remarque que « ces difficultés favorisent les inégalités en santé et interrogent certaines dynamiques volontaires ou inconscientes d’une médecine de tri ».
La journaliste relève que « les personnes obèses qui intériorisent les préjugés liés au poids font état d’une moins bonne santé et d’une moins bonne prise en charge dans le système de santé, comme l’a montré une étude américaine publiée en 2021 dans Obesity. […] Un constat d’autant plus inquiétant que l’obésité est associée à de nombreuses pathologies et à une espérance de vie inférieure à celle de la population générale ».
Anne-Sophie Joly, présidente du Collectif national des associations d’obèses, déclare que « la stigmatisation n’est pas toujours consciente et frontale. Il y a aussi beaucoup de maladresse de la part des soignants. C’est, par exemple, la personne qui doit vous faire une prise de sang et qui râle parce qu’elle ne trouve pas vos veines. Ou l’échographiste qui trouve qu’il passe trop de temps pour faire les images. À force d’entendre ces réflexions, vous renoncez aux soins ».
Anne Prigent aborde un « autre exemple de population stigmatisée : les personnes atteintes d’une pathologie psychiatrique sévère et chronique. Ces dernières ont une espérance de vie diminuée de 15 à 20 ans par rapport à la population générale. Les causes identifiées à l’origine de cette surmortalité étant essentiellement somatiques (cancers et maladies cardiovasculaires), ce sont des situations médicales souvent évitables qu’il est possible de prévenir ou tout du moins prendre en charge suffisamment tôt ».
Le Dr Nabil Hallouche, président de l’Association nationale pour la promotion des soins somatiques en santé mentale (ANP3SM), observe que « pour toute autre population, on crierait au scandale devant un tel constat ».
La journaliste relève en outre que « lors de l’épidémie de Covid, les patients atteints de schizophrénie ont été moins fréquemment admis en unité de soins intensifs que les autres (23,7% contre 28,4%) ». Le Dr Guillaume Fond, « qui a mené une étude parue en avril dans Schizophrenia », indique : « Ce sont parfois des patients plus difficiles, qui vont par exemple arracher leur perfusion et demander plus de temps aux équipes ».
Anne Prigent ajoute que « cette moindre attention à ces patients particuliers n’a rien d’exceptionnel, hélas. De nombreuses études montrent des retards de diagnostic et de prise en charge. […] Face à des patients que l’on nomme pudiquement « compliqués », les médecins vont se lasser ou se laisser piéger par la maladie psychiatrique ».
La Dr Julie Gilles de la Londe, membre du collège des généralistes enseignants, souligne que « c’est lié à un problème plus général en médecine qu’on appelle la labélisation. Nous avons tendance à mettre des étiquettes sur les gens : il est diabétique, il est obèse, il est bipolaire, etc. Mais cela réduit les patients à un problème de santé, et nous ne voyons plus toute la complexité de leur situation ».
La journaliste s’interroge : « Comment lutter contre cette assignation à sa pathologie ou à son handicap ? La praticienne conseille aux personnes concernées de trouver un médecin traitant avec qui développer une véritable relation de confiance. Ce qui, pour nombre de ces patients, relève de l’exploit ».
Le Pr Charles observe que « pour lutter contre ces inégalités, les médecins doivent devenir militants, c’est-à-dire être conscients que les personnes qui souffrent de troubles psychiatriques ont plus de pathologies et n’accèdent pas facilement au système de soins. Ils doivent aussi savoir que les inégalités en santé sont liées à la situation socio-économique. Ensuite, il faut se former ».
« La pollution de l’air favoriserait certains troubles neurologiques »
Date de publication : 8 novembre 2021
Soline Roy remarque dans Le Figaro : « Troubles reproductifs, respiratoires ou cardiovasculaires, cancers, diabète… Les méfaits de la pollution de l’air sur notre organisme sont de mieux en mieux connus. Mais il en est un qui passe encore souvent sous les radars : elle ferait le lit de troubles neurodéveloppementaux, neurodégénératifs et neuropsychiatriques ».
La journaliste indique qu’« une récente revue de littérature épidémiologique de Santé publique France (SPF) en dresse un panorama inquiétant. Des relations « robustes » sont relevées entre l’exposition aux particules fines durant la gestation et les premières années de vie, et le risque de troubles du spectre autistique ».
« À long terme, les PM2,5 (particules fines inférieures à 2,5 microns) sont associées à une hausse de l’incidence de la maladie de Parkinson et de troubles psychiatriques (dépression, schizophrénie, troubles bipolaires ou de la personnalité), et les oxydes d’azote au risque de démence, sans que le lien de causalité soit encore clairement établi », poursuit-elle.
Soline Roy ajoute que les pics de pollution « s’accompagnent d’une hausse des tentatives de suicide, des passages aux urgences pour décompensation psychiatrique, et pourraient aggraver un Alzheimer ou un Parkinson existant ».
Le Pr Franck Schürhoff, psychiatre à l’hôpital Henri-Mondor et professeur à l’université Paris-Est Créteil, remarque ainsi que « plus la densité de population est importante, plus il y a de pathologies psychiatriques. Pour l’expliquer, on a beaucoup étudié les facteurs psycho-sociaux, mais, depuis une dizaine d’années, on se dit que c’est peut-être lié à la pollution ».
Soline Roy note cependant que « l’étude de son impact direct reste balbutiante ». Le Dr Nicolas Hoertel, psychiatre à l’hôpital Corentin-Celton (Issy-les-Moulineaux) et maître de conférences à l’université de Paris, relève que « selon des travaux menés sur des jumeaux, les facteurs environnementaux contribueraient au moins pour moitié dans la dépression, un tiers dans les troubles bipolaires et un quart dans la schizophrénie ».
Le Pr Schürhoff explique : « On pense qu’il y a une période à risque, que c’est l’exposition de la mère lorsqu’elle est enceinte, donc le niveau de pollution à l’endroit où l’on naît et grandit, qui compte. L’exposition du cerveau en cours de maturation ferait le lit du développement de pathologies psychiatriques chez l’adulte jeune ».
Soline Roy indique que « le médecin va lancer une étude comparant, chez des sujets atteints de schizophrénie et des sujets sains, l’exposition à la pollution de la naissance à l’âge d’apparition de la maladie ».
La journaliste continue : « Quant aux mécanismes physiopathologiques, s’il existe des modèles de toxicité neurologique aiguë (l’intoxication au monoxyde de carbone responsable de syndromes parkinsoniens, par exemple), pour la pollution de l’air, on en reste aux hypothèses. Les particules fines pourraient passer la barrière hémato-encéphalique, pénétrer dans le cerveau via le nerf olfactif ou entraîner dans l’intestin «des déséquilibres qui affectent les maladies du système nerveux central», selon SPF ».
Le Pr Schurhoff rappelle que les maladies psychiatriques ont « une forte composante inflammatoire. Or les polluants de l’air inhalés font sécréter des cytokines pro-inflammatoires. Elles entraîneraient une inflammation cérébrale qui pourrait favoriser les pathologies psychiatriques, mais cela n’est pas encore formellement démontré ».
Soline Roy note enfin que « des résultats commencent à apparaître chez l’animal. […] C’est tout l’enjeu des recherches menées sur la plateforme Pollurisk par les équipes de Patrice Coll, directeur du Laboratoire inter-universitaire des systèmes atmosphériques (CNRS, universités de Paris et de Créteil), et Stéphane Jamain, généticien à l’Institut Mondor de recherche biomédicale et chercheur Inserm ».
Les chercheurs précisent : « Nous exposons des souris de différents âges […] aux mêmes types d’atmosphères que celles que l’on rencontre au quotidien, en simulant les processus de physico-chimie atmosphérique afin de reproduire des atmosphères complexes ».
« Puis nous étudions les modifications du comportement, notamment social, ou le niveau d’anxiété, et les modifications cérébrales (neuranatomie, marqueurs de vieillissement…) ainsi que l’expression de certains gènes dans le cerveau. On imagine publier les premiers résultats en 2022 », indiquent-ils.
« Les suicides et tentatives de suicide des jeunes sont-ils en hausse de 300% depuis le Covid ? »
Date de publication : 9 novembre 2021
C’est ce que demande un lecteur de Libération. Le journal relève en effet que « ce chiffre a récemment retenu l’attention médiatique. Calculé dans un hôpital parisien, il concerne les tentatives (et non les suicides) et n’est pas applicable à l’ensemble du pays, mais il est bien le symptôme d’un phénomène réel ».
Fabien Leboucq évoque ainsi des « données […] issues d’une lettre de recherche intitulée «Tendances temporelles des tentatives de suicide parmi les enfants dans la décennie avant et pendant la pandémie de Covid-19, à Paris». Publiée dans le Journal of the American Medical Association, elle porte sur les enfants de moins de 15 ans, admis aux urgences pédiatriques de l’hôpital parisien Robert-Debré, entre janvier 2010 et avril 2021. Soit 830 enfants. […] Cette augmentation ne concerne pas les suicides, puisque ces derniers ne sont pas pris en compte dans l’étude. Cette dernière porte sur les tentatives ».
Le journaliste note que « le coauteur de l’enquête Richard Delorme, psychiatre de l’enfance et de l’adolescent dans l’hôpital Robert-Debré, précise que les admissions aux urgences dans ce centre font l’objet de notes centralisées, prises par le personnel, depuis des années, et que c’est en se fondant sur ce registre qu’il a pu constater la hausse des tentatives de suicide (TS) chez les plus jeunes ».
« On retrouve bien dans cette publication le chiffre de + 299%. […] Ce dernier désigne l’augmentation des admissions aux urgences de l’hôpital Robert-Debré pour tentatives de suicide chez les moins de 15 ans entre juillet-août 2019 et mars-avril 2021. Soit entre le plus bas niveau de 2019, et le plus haut niveau de 2021 », explique Fabien Leboucq.
Il note que « si on regarde la courbe des tendances, qui gomme les variations mensuelles, la progression est logiquement moins importante, même si la hausse reste spectaculaire. Peu avant 2020, ce chiffre avait déjà presque doublé. Depuis 2021, on compte plus de 40 admissions pour tentatives de suicide par bimestre dans l’hôpital Robert-Debré, c’est deux fois plus qu’avant 2020, et même quatre fois plus que pendant la période 2011-2017 ».
Le journaliste explique que « l’augmentation apparaît ainsi comme le fruit d’un double phénomène, selon l’étude : une tendance longue et haussière, depuis environ 2016, mais aussi donc une accélération forte dans la période de la pandémie ».
Les auteurs écrivent que « de nombreux facteurs peuvent avoir contribué à cette accélération, comme la sensibilité spécifique des enfants aux mesures de prévention [mitigation], la détérioration de la santé ou de la situation économique de la famille, l’augmentation du temps d’écran et de la dépendance aux médias sociaux, ou le deuil ».
Fabien Leboucq relève que « comme toute étude scientifique, celle des équipes de Richard-Debré comporte une partie «discussion», où les auteurs réfléchissent aux limites de leur travail. […] Le psychiatre Richard Delorme rappelle aussi que l’étude porte sur un bassin de population correspondant au quart nord-est de Paris et de l’Ile de France. Soit «une population plutôt défavorisée, dont les parents ont plus travaillé que les autres pendant le Covid, plus précaires économiquement» ».
De son côté, Vincent Jardon, responsable dans les Hauts-de-France de VigilanS, « un dispositif de suivi des personnes ayant tenté de se suicider, à partir des remontées d’informations de services d’urgences partenaires », remarque qu’« il faut se méfier d’une vision centrée sur un seul hôpital », mais relève que « le constat général semble assez partagé sur le territoire national ».
Fabien Leboucq précise que « le psychiatre fait état des chiffres qui lui ont été transmis par les hôpitaux de plusieurs villes. A Rouen, on constate que les entrées aux urgences pour des TS ont presque quadruplé entre 2019 et 2020. A Marseille, il y a eu chez les moins de 15 ans deux fois plus de TS en 2021 par rapport à 2020. A Nancy par contre, si les «crises suicidaires» ont bien augmenté, ce n’est pas le cas des tentatives ».
Le journaliste note en outre que « s’il est incontestable que les tentatives de suicides sont en hausse chez les plus jeunes, il n’est pas (encore) possible d’en dire autant pour les suicides, les données concernant ces derniers n’ayant pas encore fait l’objet de publications ».
« Quant aux autres marqueurs du phénomène suicidaire, comme les pensées noires ou les dépressions, ils semblent aussi en augmentation chez les jeunes », poursuit-il.
« Santé mentale : un rapport demande l’interdiction de mélanger adultes et enfants en psychiatrie »
Date de publication : 17 novembre 2021
Bérangère Lepetit évoque dans Le Parisien « une pratique préoccupante et méconnue du grand public, pourtant en vigueur depuis des années dans le milieu hospitalier. Faute de lits suffisants dans les services de pédopsychiatrie – voire en leur absence dans certains départements – certains mineurs peuvent parfois être accueillis dans les unités destinées aux adultes ».
« Une situation qui, en plus de mettre mal à l’aise enfants et adolescents vulnérables, peut aussi leur faire courir des risques », relève la journaliste.
Elle indique qu’« à l’occasion de la Journée internationale des droits de l’enfant, qui se tient samedi 20 novembre, [la Défenseure des droits Claire Hédon et le Défenseur des enfants Éric Delemar] émettent 29 recommandations dans [un] document intitulé «Santé mentale des enfants : le droit au bien-être». Avec pour objectif d’alerter les pouvoirs publics sur le manque de moyens alloués à la pédopsychiatrie en France, le nombre insuffisant de structures de soin mais aussi la nécessité d’une meilleure prévention en milieu scolaire ».
Ils écrivent notamment : « La Défenseure des droits recommande au ministre de la Justice, garde des Sceaux, et au ministre des Solidarités et de la Santé de proposer l’inclusion dans la loi de l’interdiction d’accueil d’un mineur en unité psychiatrique pour adulte ».
« Une requête liée aux saisines effectuées ces dernières années auprès des Défenseurs des droits et des enfants à ce sujet, mais aussi une demande portée depuis longtemps par les soignants », observe Bérangère Lepetit.
Éric Delemar remarque en effet : « Il y a quelques mois, nous avons été alertés à la suite de l’agression sexuelle d’une enfant de 13 ans dans un service psychiatrique ».
Claire Hédon souligne en outre que « la crise sanitaire a été un révélateur de difficultés qui existaient depuis des années. Mais même dans [les départements] qui sont dotés [de lits spécifiques en pédopsychiatrie], parfois, il y a embouteillage dans la prise en charge. Or, s’occuper de la santé mentale de l’enfant, c’est aussi s’occuper de son avenir d’adulte épanoui et d’une société qui va mieux ».
Viviane Kovess-Masfety, psychiatre et épidémiologiste, déclare pour sa part : « Ne dramatisons pas non plus la situation. Quand il n’y a pas assez de place en pédopsychiatrie, les enfants vont en pédiatrie. Il ne faut pas croire qu’on met des fillettes de 5 ans avec des grands schizophrènes. Le problème vient aussi du fait qu’on envoie en psychiatrie des enfants confrontés à des troubles psychologiques de base comme des problèmes d’éducation. Résultat : ces services sont submergés ».
Christine Barois, pédopsychiatre, note de son côté que « depuis 30 ans, il est compliqué de faire hospitaliser les mineurs en psychiatrie car ce qui a été privilégié historiquement c’est le soin ambulatoire, pour que l’enfant puisse rejoindre ses parents le soir. Or, quand la souffrance est trop grande ou le trouble trop important, le séjour long est nécessaire. Les moyens manquent cruellement, comme en psychiatrie en général ».
Bérangère Lepetit ajoute que « Claire Hédon et Éric Delemar insistent aussi sur la prévention à renforcer en France, à la nécessité de faire «de la médecine scolaire et du service social aux élèves une véritable priorité» ou «à permettre à chaque enfant scolarisé d’accéder à des activités permettant le développement de ses compétences psychosociales» ».
Le Figaro titre pour sa part que « les problèmes de santé mentale des enfants connaissent une aggravation ».
Agnès Leclair observe ainsi : « Troubles anxieux, phobies sociales, addictions… Pour la défenseur des droits, «il y a urgence». Elle alerte sur le manque de prise en charge des plus jeunes, pour lesquels la crise sanitaire a été un révélateur ».
La journaliste relève notamment qu’« au-delà des difficultés bien connues des services de pédopsychiatrie en France, son rapport appelle à dépasser une approche «strictement sanitaire» et à mettre l’accent sur la prévention. […] Pour assurer un meilleur suivi, plus global, des plus jeunes, [Claire Hédon] recommande notamment la création de «maisons des enfants» sur le modèle des «maisons des adolescents» ».
Agnès Leclair remarque que « si les effets à long terme de la pandémie ne sont pas connus, certains seraient déjà apparents, comme des situations de repli ou de «syndrome de la cabane». C’est en tout cas ainsi que l’institution interprète le doublement des demandes d’école à la maison, enregistré par la direction des services départementaux de l’Éducation nationale du département du Rhône pour l’année scolaire 2021-2022 ».
La Croix constate également que « la santé mentale des jeunes [est] mise à mal par la crise sanitaire, alerte la défenseure des droits ».
Le journal observe entre autres que « la fermeture des établissements scolaires et l’enseignement à distance ont aggravé «les risques d’addiction» aux écrans, a relevé le défenseur des enfants Éric Delemar ».
Ce dernier fait savoir que les professionnels « nous ont interpellés sur les difficultés des rythmes circadiens, des troubles alimentaires, du sommeil des enfants, qui étaient épuisés dans les écoles, qui souffrent de problèmes d’attention. Les professeurs ont du mal à les mobiliser sur des projets ».
La Croix ajoute que « les enfants et jeunes ont eu l’impression de ne pas être écoutés ni consultés pendant cette crise sanitaire ».
« Enfants nés d’un don : « Retrouver mon donneur était la pièce manquante d’un puzzle » »
Date de publication : 18 novembre 2021
Alice Le Dréau livre dans La Croix les propos de Jeanne, 32 ans, qui « a su très tôt qu’elle était née grâce à un don de sperme. Il y a 3 ans, elle a retrouvé son donneur et des réponses à ses questionnements identitaires ».
La jeune femme observe ainsi : « Certains jours vous vous regardez dans un miroir et vous vous demandez : pourquoi ai-je ces oreilles ? Ces cheveux ? D’où me vient tel ou tel trait de personnalité ? ».
Alice Le Dréau explique qu’« elle avait 8 [ans] lorsqu’elle a découvert qu’elle était née d’un don de sperme. «Pour ma mère, cela n’avait jamais eu vocation à rester un secret.» […] Cela fait 3 ans que son père est mort. Mais 8 ans, c’est tôt pour se poser la question de ses origines ». Jeanne précise : « Quand bien même j’aurais voulu savoir, l’anonymat était, à l’époque, de rigueur pour tous les donneurs de sperme» ».
Elle poursuit : « De temps en temps, la question de l’identité de mon donneur me traversait l’esprit. [Il y a] comme une part de soi qui reste inconnue. Une pièce manquante. […] Le désir d’enfant de mes parents, je le connais. Mais le donneur ? Pourquoi avoir fait ce don ? Ce n’est pas tout à fait un don de sang ou d’organe ».
Alice Le Dréau indique qu’« en 2019, elle voit passer une publicité pour des tests ADN. Interdits en France – les tests génétiques n’y sont autorisés qu’à des fins de médecine préventive –, ces tests dits « récréatifs » permettent à tout un chacun de savoir de quelle partie du monde sont originaires ses ancêtres ».
Jeanne observe : « Là, en parcourant le site, je comprends que la base de données établit aussi des correspondances génétiques. J’avais ouvert la boîte de Pandore ».
La journaliste note qu’« en mars, la jeune femme envoie son échantillon. En reçoit les résultats le 6 avril. On lui signale la présence dans la base de données d’un cousin germain. «Blanc, comme mon donneur (et mon père), alors que ma mère est Antillaise !» Dès lors, elle remonte la piste via des plateformes de généalogie, les réseaux sociaux ».
Jeanne relève : « J’ai eu de la chance, une branche de la famille de mon donneur a un nom peu commun. Je n’ai pas eu à payer un détective privé, comme certains ».
Alice Le Dréau explique qu’« en 3 semaines, elle localise son donneur. Lui écrit une lettre. La poste un mardi. Reçoit une réponse le jeudi. Après des mois d’échanges épistolaires, elle rencontre Didier ».Jeanne déclare : « Nous avons la même corpulence, les mêmes oreilles, un goût certain pour le chocolat noir. On me dit que l’on se ressemble. Perso, je ne trouve pas ça flagrant ».
La journaliste relève que « pour Jeanne, mettre un visage sur son donneur, c’était combler un vide mais aussi «remettre un peu d’humanité» dans son mode de conception. Se dire «que l’on n’est pas juste issue d’une manipulation en laboratoire». Se chercher un père aussi, elle qui a perdu le sien ? ».
Pierre Lévy-Soussan, pédopsychiatre, observe pour sa part : « Quand un adulte né d’un don part à la recherche de ses origines, il y a toujours eu, à la base, une fragilité de la position du ou des parents face à cette technique médicale. L’appel du biologique, à l’âge adulte, est alors l’effet de la fragilisation du lien psychique du parent vers l’enfant, faute de se considérer comme le “vrai parent” ».
Jeanne précise : « J’aurais pu vivre avec cette inconnue autour de mes origines, mais quand j’ai rencontré Didier, j’ai eu l’impression de terminer un puzzle. […] Cette pièce de puzzle ne suffit pas. Oui, l’identité se bâtit sur des réalités biologiques, génétiques, mais pas que. Sur des valeurs que nous inculquent ceux qui nous élèvent, aussi. Et bien sûr, on se construit par soi-même ».
Alice Le Dréau évoque en outre la nouvelle loi de bioéthique, rappelant qu’« à partir de septembre 2022, tout donneur devra accepter de donner son identité si, à sa majorité, l’enfant né du don veut la connaître ».
« Une impressionnante ébauche d’atlas du cerveau »
Date de publication : 19 novembre 2021
Soline Roy fait savoir dans Le Figaro qu’« un très large consortium américain a caractérisé et classé les cellules du cortex moteur avec une précision jamais atteinte à ce jour ».
La journaliste remarque ainsi : « Des centaines de milliards d’éléments de types différents, connectés les uns aux autres et communiquant en ordre apparemment dispersé dans divers dialectes, et dont les défaillances de quelques-uns peuvent mettre en difficulté l’ensemble du groupe… Cela vous paraît complexe ? Bienvenue au pays des neurosciences ! ».
Elle note qu’« en apparence, tout est simple : le cerveau recèle deux types de cellules, les neurones et les cellules gliales, qui les nourrissent, les supportent et les protègent. Complexifions un peu les choses avec les dendrites, multiples ramifications acheminant de l’information vers le corps du neurone, et l’axone, filament plus ou moins long qui lui permet d’en envoyer à son tour. Entre deux neurones, des synapses, par où transitent les informations. Un schéma simple en apparence, qui cache une infinie complexité… ».
Soline Roy explique qu’« une trentaine de laboratoires de recherche réunis au sein de la Brain Initiative, dotée de plus de 6 milliards de dollars, a entrepris de dresser un « atlas » des cellules cérébrales et a livré début octobre, dans 17 articles publiés dans Nature, les premiers fruits de son travail. L’idée des membres du consortium : pour comprendre le fonctionnement de notre cerveau, il faut d’abord connaître chacun de ses constituants ».
La journaliste précise que « les auteurs se sont pour l’heure concentrés sur le cortex moteur, pilote de l’exécution des mouvements. Avantages : il est présent chez tous les mammifères, ce qui permet de comparer les résultats obtenus chez différentes espèces. […] De multiples techniques ont été utilisées, voire mises au point, pour caractériser et classer chacune des cellules de ce cortex moteur selon leur morphologie, leurs types de connexions, leur localisation, l’expression de leurs gènes, leurs modifications épigénétiques et leurs propriétés électrophysiologiques ».
Brian Lau, directeur de recherche à l’Institut du cerveau (ICM), remarque que « c’est un travail très impressionnant. J’ai distribué les articles à mon équipe, chacun d’entre eux est tellement riche que cela va nous prendre des mois pour tout digérer ! ».
Soline Roy note que « notre cerveau est cependant très loin d’être mis à nu… ».
Christophe Bernard, directeur de recherche à l’Institut de neurosciences des systèmes (Inserm/Université d’Aix-Marseille), observe que ces travaux « ne tiennent pas compte de deux réalités biologiques qui rendent les résultats très difficilement interprétables. D’une part, il a été démontré, notamment par mon équipe, que les protéines des cellules cérébrales fonctionnent avec un rythme circadien ; au niveau des synapses, par exemple, l’expression de 70% des protéines change en fonction de l’heure de la journée. […] Les auteurs ont regardé une image, mais on ne sait pas à quel instant ils ont prélevé le tissu neuronal chez les animaux, et l’image aurait peut-être été complètement différente si ça avait été 6 heures plus tard ».
Le chercheur évoque en outre le concept de « “dégénérescence du code” : dans le vivant, il existe de multiples types de solutions au même problème. Vous et moi n’avons pas les mêmes gènes ni la même histoire, donc l’expression de nos protéines est différente. Pourtant, nous fonctionnons à peu près de la même façon ».
Soline Roy note que « mesurer une variable biologique en faisant la moyenne de plusieurs individus ne donne donc qu’une idée imparfaite du fonctionnement de chacun, et c’est d’autant plus vrai pour le cerveau qu’il est constamment modelé par l’apprentissage et l’expérience ».
La journaliste retient que « ces travaux n’auront certes pas avant longtemps d’application en santé humaine. Mais comme l’a été le projet génome humain en son temps, «c’est une brique qui permet de l’imaginer», estime Brian Lau. La Brain Initiative, tout comme le Human Brain Projet européen et d’autres initiatives nationales comme le Brain/Minds japonais, ont mis leurs données en accès libre et envisagent de les interconnecter ».
« Malaise, maltraitances et burn-out : chez les jeunes sages-femmes, l’appel de la reconversion »
Date de publication : 23 novembre 2021
Margherita Nasi note dans Le Monde que « depuis le début de l’année, les sages-femmes multiplient les grèves et les manifestations. De nouveau, elles se mobilisent samedi 27 et dimanche 28 novembre. Mille trois cents jeunes professionnels étaient présents à la dernière manifestation, en octobre à Paris, soit un quart des étudiants. Un mouvement inédit, selon Chantal Seguin, directrice de l’école de sages-femmes de Grenoble ».
La responsable déclare que « les jeunes passent une sélection drastique pour accéder à l’école, endurent des années difficiles sur le plan théorique comme clinique, tous ces sacrifices pour se retrouver à multiplier les CDD à la sortie de l’école, avec un salaire de 1700 euros net par mois à bac + 5 ».
Margherita Nasi relève ainsi que « selon la dernière enquête « Bien-être étudiant » de l’Association nationale des étudiants sages-femmes (Anesf), 7 étudiants en maïeutique sur 10 présentent des symptômes dépressifs, et 8 sur 10 souffrent d’un stress accru depuis leur entrée dans la formation. 27% ont déjà pensé à arrêter leurs études ou à se réorienter ».
La journaliste indique qu’« annoncées en septembre, les concessions du gouvernement – mise en place d’une prime de 100 euros net aux sages-femmes à l’hôpital et d’une hausse des salaires de 100 euros brut par mois – sont jugées insuffisantes par les organisations syndicales ».
Laura Faucher, présidente de l’Anesf, déclare que « ce geste n’est pas à la hauteur de nos responsabilités. Il faut rendre le métier plus attractif. Les étudiants sont traumatisés par les conditions de travail à l’hôpital et fuient. Pendant l’été 2021, certaines maternités ont dû fermer leurs portes en raison du manque de jeunes diplômés qui remplacent généralement les sages-femmes pendant leurs congés ».
Loona Mourenas, étudiante en quatrième année à Grenoble, note ainsi : « Deux promos au-dessus, sur 37 étudiants au départ, 19 seulement ont été diplômés. […] On voit des parturientes attendre devant les portes de l’hôpital pendant leur travail, ou accoucher sans péridurale alors que ce n’était pas leur souhait. Parfois, on ne peut même pas les suivre : on arrive juste au moment de l’expulsion, puis on quitte la patiente qu’on ne voit plus jamais. On frôle la maltraitance ».
Margherita Nasi remarque que « de plus en plus d’étudiants reportent la soutenance de leur mémoire d’un an, voire deux ans, en raison d’un programme extrêmement dense ».
Isabelle Derrendinger, secrétaire générale du conseil national de l’ordre des sages-femmes et directrice de l’école de Nantes, relève : « Lutte contre les violences faites aux femmes et contre les violences gynécologiques obstétricales, pratique de l’IVG… De multiples formations sont venues s’ajouter au programme ces dernières années. Les étudiants réclament une refonte du cursus avec la création d’une sixième année d’études ».
La journaliste continue : « D’après l’Asnef, les étudiants en maïeutique auraient 1400 heures de cours de plus que les étudiants en dentaire, dont la formation s’étend déjà sur 6 ans. Epuisées par leurs études, choquées par les mauvaises conditions de travail, les sages-femmes sont surtout démotivées par le manque de reconnaissance ».
Jade Gobet, étudiante en quatrième année à Dijon, évoque ainsi « les patientes qui ne s’adressent qu’au médecin alors qu’on fait le plus gros du boulot. Les ordonnances où on lit que la prescription est faite par le médecin, alors qu’elle est faite par nous. On n’est même pas reconnues sur un bout de papier ! ». L’étudiante déclare vouloir « partir dans le libéral, comme la moitié de [s]a promo ».
Margherita Nasi note ainsi que « d’après une étude de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), publiée en mars, le nombre de sages-femmes libérales (ou en activité mixte) ne cesse d’augmenter depuis 2012. En 2021, 34% des sages-femmes exercent une activité libérale, contre seulement 20% en 2012 ».
La journaliste indique que « pour faire face «au malaise profond et récurrent des sages-femmes», l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) propose l’octroi d’un «statut d’agent public spécifique». Son rapport, publié en septembre, est perçu comme injuste par une partie de la profession, qui réclame le statut de praticien hospitalier, au même titre que les médecins, les biologistes, les chirurgiens-dentistes et les pharmaciens ».
Margherita Nasi remarque que « pour Bertrand de Rochambeau, président du Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France, les sages-femmes ne peuvent pas prétendre au statut de praticien hospitalier «puisqu’elles n’ont pas une pratique du diagnostic et de la pathologie. Leur enseignement, qui est sur 5 ans, et non sur 7 ans plus 4 de spécialité comme les médecins, porte sur la grossesse normale et l’accouchement normal. Jamais on ne leur apprend les maladies. Nos rôles ne sont pas les mêmes, nous sommes complémentaires» ».
Le Monde annonce en outre « un accord signé entre les syndicats et le gouvernement pour de nouvelles hausses de salaires ».
Le journal explique que « les ministres de la santé, Olivier Véran, et de la fonction publique, Amélie de Montchalin, ainsi que le secrétaire d’Etat chargé de l’enfance et des familles, Adrien Taquet, ont salué dans un communiqué les «avancées importantes» de ce document paraphé par Force ouvrière (FO), la Confédération française démocratique du travail (CFDT) et l’Union nationale des syndicats autonomes (UNSA), côté employés, et la Fédération hospitalière de France (FHF), côté employeurs ».
Le Monde retient que « le protocole d’accord inclut notamment une «prime d’exercice médical» de 240 euros net par mois à partir de février, puis une augmentation salariale de 78 euros net en moyenne à partir du mois de mars pour les sages-femmes des hôpitaux publics, qu’elles soient titulaires ou contractuelles ».
« En additionnant ces mesures aux 183 euros décidés lors du Ségur de la santé et versés mensuellement depuis la fin de 2020, le gouvernement met en avant une «revalorisation nette de 500 euros par mois». Un montant plus élevé que les 360 euros mensuels promis à la mi-septembre par M. Véran », relève le journal.
Le Monde indique toutefois que « le protocole ne satisfait pas tous les syndicats de la profession. Un nouveau «week-end noir» est prévu du 26 au 29 novembre, à l’appel de l’Organisation nationale syndicale des sages-femmes (ONSSF) et avec l’appui de la Confédération générale du travail (CGT) qui a déposé un préavis pour couvrir le mouvement. Chez les signataires, «on ne dit pas que c’est suffisant, mais c’est un accord d’étape qui reste positif», souligne Gilles Gadier (FO-Santé), qui entend «continuer à travailler» sur le statut et les effectifs ».
« Qui est Gabriel Sara, le cancérologue qui apaise la douleur par la musique ? »
Date de publication : 24 novembre 2021
C’est ce que titre Le Parisien, qui indique que « ce médecin libanais exerçant à New York joue son propre rôle dans le film d’Emmanuelle Bercot. Celui d’un oncologue extraordinairement humain qui va accompagner jusqu’au bout l’ultime voyage de son patient atteint d’un cancer incurable ».
Le journal explique que « le Dr Gabriel Sara a créé un programme dans son hôpital new-yorkais pour aider le malade à gérer sa souffrance, «kidnapper son esprit de la salle de chimio vers quelque chose qui le fait rêver» ».
Le Parisien note que « ce 17 novembre, il enchaîne les interviews, les télés, se fait maquiller, déplacer d’une pièce à l’autre, et prêche inlassablement, avec chaleur, la bonne parole. Celle de l’empathie pour ses malades, à qui il fait danser le tango ou écouter de la musique live dans leurs chambres. Face à Benoît Magimel et Catherine Deneuve, Gabriel Sara, 67 ans, est la troisième star de « De son vivant ». C’est la première fois que cet oncologue-hématologue au service de cancérologie de l’hôpital Mont-Sinaï-Roosevelt, à New York, fait l’acteur ».
« Il n’avait pas prévu d’aller aussi loin, mais il tenait à faire connaître son approche très émotionnelle du malade, fondée sur la musique ou l’art pour atténuer certaines douleurs, à la réalisatrice Emmanuelle Bercot », indique le quotidien.
Le Dr Sara déclare : « Quand la guerre du Liban a éclaté, en 1975, j’avais 21 ans et j’étais étudiant en 3e année de médecine à Beyrouth. La guerre a eu un effet énorme dans ma vie. La fac a fermé. J’ai rejoint la Croix Rouge libanaise, comme secouriste. J’ai vécu la guerre de façon très physique, très directe et très violente. Je me suis rendu compte quand j’ai commencé à être cancérologue que j’avais une aisance très grande à gérer les choses très graves. Et la mort. Vous voyez des amis, des parents, des voisins disparaître. Moi-même j’aurais dû être tué à plusieurs reprises. […] La guerre m’a rendu la mort très familière ».
Le Parisien explique que « Gabriel Sara quitte Beyrouth pour Paris, où il poursuit ses études de médecine, puis s’installe à New York ».
Le médecin poursuit : « J’ai toujours senti qu’il fallait donner un soutien émotionnel aux malades. J’aime les écouter, ils m’intéressent personnellement. Une jeune Italo-Américaine de 39 ans allait mourir de façon imminente d’un cancer du sein. Une femme adorable. Un soir, je lui demande : Qu’est-ce que je peux faire pour vous ? Elle me dit : Je crève d’envie de manger des lasagnes. Je réfléchis : On n’est même pas capable de faire plaisir à cette femme dans ses dernières heures ? Il y avait un bon restaurant italien à côté. Je lui ai fait livrer des lasagnes. Le lendemain elle avait un énorme sourire. Elle n’a vécu que 4 ou 5 jours, mais elle a raconté l’histoire à tout le monde. Ça m’a coûté une minute et 20 dollars pour donner du bonheur avec une chose aussi simple ».
« Combien de petits gestes peut-on faire pour rendre heureux un malade ? On peut améliorer la cuisine, leur apporter des fleurs, leur jouer de la musique, leur faire des massages, les aider à se maquiller… Les idées ne manquent pas. J’ai réfléchi à un programme de soutien émotionnel. En 2005, l’une de mes amies est décédée à 36 ans d’un cancer du sein. J’étais très copain aussi avec son mari. Ils disposaient de beaucoup de moyens et il m’a demandé s’il pouvait aider l’hôpital avec une levée de fonds. On a commencé comme ça », continue l’oncologue.
Il indique ainsi : « Dans mon hôpital, on a conçu un programme de musicothérapie, d’art, on fait venir une maquilleuse professionnelle. Beaucoup de malades qui perdent leurs cheveux, leurs sourcils, n’ont pas les moyens d’acheter des produits de beauté. Se faire belle, même là, ça remonte le moral. On a engagé une masseuse. J’ai créé un programme de voyages, avec une loterie tous les deux mois. Le gagnant remportait une croisière. L’idée est d’aider le malade à gérer sa souffrance et de kidnapper son esprit de la salle de chimio vers quelque chose qui le fait rêver. C’est ce que j’appelle les petites choses qui font les grandes différences. Plus tard, on a ajouté le tango, que l’on voit dans le film. Ça a galvanisé la salle de chimio ».
Le Parisien observe : « La méthode Sara, qui repose uniquement sur des fonds privés, est-elle importable en France ? ».
Le Dr Sara répond que « c’est imaginable n’importe où dans le monde. Il faut deux facteurs : une personne qui est le moteur pour faire avancer le projet, comme un réalisateur de film, capable de motiver les gens et de créer l’enthousiasme. On ne peut pas faire ces choses comme un simple boulot. Et il faut un budget. Je ne crois pas au volontariat prolongé. Cette approche doit être encadrée et ne pas déborder d’un emploi du temps normal ».
« L’idée du film est de propager cette philosophie. Je ne suis pas dans le milieu hospitalier en France. On doit casser cette idée du médecin avec un pouvoir énorme et distant du malade, comme je l’ai connue et comme elle existe encore dans bien des endroits. Il faut que les étudiants en médecine sachent qu’on doit danser avec son malade, enlacer son malade, physiquement ou émotionnellement, créer une intimité avec lui. L’idée souvent propagée, c’est que si l’on devient trop proche du malade, on va être détruit émotionnellement. C’est faux. Le malade ressent que vous avez de l’empathie pour lui », déclare l’oncologue.
« Apprendre « les mots qui sauvent » pour devenir secouriste en santé mentale »
Date de publication : 29 novembre 2021
Juliette Chaignon se penche dans Le Figaro sur les secouristes en santé mentale, qui « ont vocation à devenir un premier relais de prévention et d’orientation vers des professionnels de santé. […] Depuis 2019, l’association PSSM France a formé plus de 12.000 personnes à ces premiers secours ».
La journaliste explique ainsi que les participants à cette « formation d’un nouveau genre ont étudié les troubles dépressifs, la bipolarité et les comportements suicidaires. Depuis 2019, l’association Premiers secours en santé mentale (PSSM) forme, sans prérequis, des secouristes en santé mentale. À travers des jeux de rôle, des saynètes, des témoignages, des exercices et des œuvres d’art, les stagiaires apprivoisent les troubles psychiques, pour adopter un regard moins stigmatisant sur les troubles psychiques et apprendre à réagir dès les premiers signes ou lors d’une crise survenant dans leur cercle proche ».
Un participant à Bordeaux déclare : « Je perçois un peu plus l’envers du décor, la souffrance de ces personnes, avant je percevais ça comme une agression, un danger ». Une autre s’interroge : « Quelle différence entre un trouble schizo-affectif et un bipolaire avec troubles psychotiques ? ». La formatrice répond : « On laisse ça aux psychiatres. […] On ne pose pas de diagnostic ».
Juliette Chaignon souligne ainsi que « les secouristes en santé mentale ont plutôt vocation à devenir un premier relais de prévention et d’orientation vers des professionnels de santé ».
La journaliste explique que « durant les 14 heures de formation, un « plan d’action » et son moyen mnémotechnique (« AÉRER », pour approcher, écouter, réconforter, encourager, renseigner) s’ancre dans l’esprit des participants jusqu’à devenir un réflexe. Ils l’appliquent aux troubles les plus courants : troubles dépressifs, anxieux, psychotiques et liés à l’usage de drogues ou d’alcool. En France, plus d’une personne sur quatre (27,1%) a souffert de l’un de ces troubles au cours des 12 derniers mois ».
« Le groupe apprend aussi à réagir en cas de crise, et certains conseils peuvent étonner. En cas de comportement suicidaire, par exemple, rien ne sert de tourner autour du pot, mieux vaut poser directement la question : «As-tu des idées suicidaires ?» Cela n’en induira pas chez quelqu’un qui n’en a pas, souligne la formatrice, et n’augmentera pas le risque de passage à l’acte », continue Juliette Chaignon.
Elle continue : « Face à une personne semblant souffrir de troubles psychiques, le « plan PSSM » incite à écouter « sans juger », réconforter, informer et encourager à consulter des professionnels de santé, sans forcer la main. […] La formatrice incite aussi les secouristes à veiller à leur propre santé mentale pour intervenir sereinement. […] Pendant les cas pratiques, la formatrice ne donne pas de correction exacte, mais insiste sur l’attitude à tenir : ne pas stigmatiser la personne, la rassurer et l’aider ».
Juliette Chaignon observe que « les situations ne semblent pas manquer. Une travailleuse sociale s’est inscrite après avoir dû gérer une crise suicidaire au téléphone, une conseillère en insertion se sent «mieux armée» pour recevoir cet homme qui souvent «se tape la poitrine en parlant de coups de couteau», une responsable sécurité d’une entreprise d’intérimaires estime ne «pas (avoir) eu la bonne réaction» avec un ami dépressif ».
« L’activité physique a un effet anxiolytique »
Date de publication : 30 novembre 2021
Pascale Santi observe dans Le Monde que « l’activité physique régulière a des effets positifs sur la dépression, la littérature scientifique l’a montré depuis de nombreuses années. Elle atténue aussi les symptômes d’anxiété ».
La journaliste fait savoir qu’« une équipe suédoise de l’université de Göteborg a étudié chez 286 patients – 70% de femmes –, dont la moitié souffrait de troubles anxieux depuis au moins dix ans, de 39 ans d’âge moyen, les effets de séances d’exercice accompagné, en groupe, soit d’intensité modérée à faible, soit d’intensité élevée, pendant douze semaines, en les comparant à un ensemble de patients témoins ».
Elle retient que « l’étude, publiée en ligne dans Journal of Affective Disorders en novembre, montre que les symptômes d’anxiété ont été «significativement atténués avec ces exercices (une séance d’une heure trois fois par semaine), quelle que soit leur intensité, avec un peu plus d’effet lorsque l’exercice était plus soutenu» ».
Pascale Santi rappelle qu’« une méta-analyse coordonnée par Elizabeth Aylett (université de Manchester), qui a répertorié 15 études, réalisées sur 675 patients, avait déjà mis en évidence que l’exercice aérobique s’est avéré efficace dans le traitement de l’anxiété. Une étude conduite en prison auprès de 37 détenus (qui n’avaient jamais été incarcérés) par Fabien Legrand, maître de conférences en psychologie à l’université de Reims Champagne-Ardenne, illustre les bénéfices de l’exercice ».
La journaliste s’interroge : « Comment expliquer cet effet thérapeutique ? L’aspect socialisant du sport pourrait être porteur. Mais les effets positifs ont également été montrés en pratiquant une activité physique en solo. On sait par ailleurs que cela améliore l’estime de soi ».
Antoine Pelissolo, chef de service de psychiatrie des hôpitaux Henri-Mondor et Albert-Chenevier (AP-HP, Créteil), indique qu’« il a été démontré que l’aérobie, grâce à la régulation de la respiration qu’elle engendre, améliore le trouble de panique ». Il évoque en outre « les effets sur la gestion du stress, l’amélioration du sommeil, et donc indirectement sur la fatigue ».
Pascale Santi ajoute que « le sport a aussi un impact au niveau biologique ». Florian Ferreri, psychiatre à l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP), explique : « Cela favorise la neurogenèse, la production de nouvelles cellules. Cela modifie la sécrétion de certains neuromédiateurs (dopamine, sérotonine) et cela procure du plaisir par la sécrétion de certaines endorphines qui ont des propriétés apaisantes ».
Fabien Legrand précise que « l’activité physique va stimuler la production de dynorphines, qui sont des peptides opioïdes ayant un rôle bien établi dans l’atténuation de la douleur et l’apaisement de l’humeur ».
La journaliste conclut : « Mais comment agir pour motiver les personnes souffrant de troubles anxieux, souvent associés à de la fatigue, à faire de l’activité physique ? Il faut donner envie. Dans tous les cas, tout mouvement est bon à prendre ».
« Retour à la revue de presse.