Revue de presse santé psy – mars 2025
« Jeux d’argent : des chercheurs français veulent comprendre ce qui se passe dans le cerveau des joueurs »
Date de publication : 4 mars 2025

Anne Prigent remarque dans Le Figaro que « plus de la moitié des Français entre 18 à 75 ans ont joué à [des] jeux d’argent et de hasard en 2023. Un pourcentage en hausse de 4,6 points depuis 2019. Une augmentation qui n’est pas sans conséquence puisque 1,7% sont considérés comme des joueurs à risque modéré de développer une addiction, selon l’observatoire Français des drogues et tendances addictives (OFDT) ».
« Soit 810.000 personnes, qui peuvent perdre le contrôle et tomber dans une spirale de jeu compulsif aux conséquences dramatiques », souligne la journaliste.
Anne Prigent observe : « Que se passe-t-il exactement dans le cerveau lorsque l’on devient addict au jeu ? », et fait savoir qu’« une équipe de Lyon cherche des volontaires, joueurs réguliers, pour étudier les mécanismes cérébraux ».
Guillaume Sescousse, chercheur à l’Inserm et directeur adjoint du Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon, remarque : « Comme dans le cas de l’addiction aux substances, un faisceau d’observations indique un rôle central de la dopamine dans l’addiction aux jeux d’argent ».
« L’une des hypothèses les plus consensuelles est que les personnes qui deviennent addicts auraient une plus faible densité de certains récepteurs dopaminergiques (dits D2), avec des réponses cérébrales à la récompense diminuées. Pour compenser ce déficit, ces personnes seraient naturellement attirées par des activités qui vont générer des récompenses fortes et donc des décharges de dopamine importantes », précise le chercheur.
Anne Prigent note toutefois que « dans le cas de l’addiction aux jeux d’argent, le mécanisme sous-jacent semble différent et reste encore mal compris ».
La journaliste indique que « l’étude lancée par Guillaume Sescousse et son équipe à Lyon pourrait apporter des éléments de réponses ».
Le chercheur précise : « Nous cherchons à distinguer de possibles différences au niveau cérébral, en fonction du type de joueur. En effet, il y a grande diversité de joueurs, et certains vont par exemple jouer plutôt sous le coup d’émotions négatives, alors que d’autres vont plutôt jouer sous le coup d’émotions positives. De plus nous pensons que les mécanismes en cause chez les joueurs de poker ne sont sans doute pas les mêmes que ceux en cause chez les adeptes de machine à sous… ».
Anne Prigent indique que « pour cela, il est à la recherche d’une cinquantaine de volontaires, joueurs réguliers. […] À terme, l’objectif sera de proposer des prises en charge personnalisées pour les personnes concernées par cette addiction ».
« Violences, insultes… Le quotidien « insoutenable » des soignants de l’hôpital psychiatrique de Bures-sur-Yvette »
Date de publication : 7 mars 2025

Nolwenn Cosson constate ainsi dans Le Parisien : « Coups de poing et de pieds, morsures jusqu’au sang, jets d’urines au visage, crachats… C’est face à une situation devenue « insoutenable » qu’ils ont décidé de prendre la parole ».
La journaliste explique que « l’hôpital du Grand-Mesnil, à Bures-sur-Yvette (Essonne), accueille une soixantaine de patients présentant des troubles psychiatriques. Derrière les portes, systématiquement fermées à clé, des trois étages, les violences verbales comme physiques sont devenues le quotidien des soignants qui se relaient jour et nuit. Ils assurent aujourd’hui ne plus être en mesure d’exercer leur métier dans de bonnes conditions ».
Un soignant souligne : « Nos patients sont de plus en plus ultra-violents. Il n’y a pas une semaine où l’on ne se fait pas taper dessus, pas une semaine où un patient ne s’en prend pas à un autre. On est insultés et menacés de mort de façon régulière par les patients, mais aussi par leur entourage. Ce n’était pas stipulé lorsqu’on a choisi cette voie. Et la réponse de notre direction, c’est : Inscrivez-vous à des formations de self-défense… ».
Nolwenn Cosson relève que « le parking comme l’entrée du bâtiment sont accessibles à tous. Il n’y a pas d’équipe de sécurité formée à la psychiatrie pour assister les agents, et les policiers ne peuvent pas toujours rapidement intervenir sur place. Le système de PTI (protection pour les travailleurs isolés), sorte de bipeur qui permet à tout moment d’alerter les collègues en cas de problème et d’être localisé, n’est pas fonctionnel. Pire encore : lors des transferts de patients détenus vers l’hôpital, les soignants voyagent en leur compagnie sans connaître leurs antécédents ».
Une soignante observe : « Nous avons bien obtenu la présence de policiers. Mais ils suivent dans une autre voiture. Si, dans l’ambulance, il se passe quoi que ce soit, on est seuls face à eux ».
La journaliste précise que « c’est aussi pour les patients que le personnel a décidé de parler. L’architecture du bâtiment peut se révéler propice aux pendaisons, notamment les balcons accessibles par les chambres. Lorsqu’un patient est sur un brancard, les infirmiers doivent passer par l’arrière du bâtiment et dans les cuisines pour accéder aux étages. […] Les chambres d’isolement, censées garantir la sécurité du personnel et des patients lors des situations de violence ou de crise suicidaire, n’ont ni toilettes ni point d’eau ».
La CGT indique que « cette situation est indigne d’un service de santé psychiatrique en 2025 et met en lumière un manque de moyens et de considération des autorités concernées ».
Nolwenn Cosson note que « l’agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France rappelle qu’un plan doté de 4 millions d’euros est déployé en Essonne pour renforcer l’offre psychiatrique. Les projets de modernisation des infrastructures bénéficient d’un suivi régulier dans le cadre du Ségur de l’investissement ».
L’ARS indique être « particulièrement attentive à la sécurité des soignants et soutient les initiatives de sensibilisation des patients ainsi que la sécurisation des locaux. Un plan de sécurisation avec la présence 24 heures sur 24 d’un vigile dans les unités cliniques a été mis en place depuis 18 mois ».
La journaliste relève que « sur les transferts de détenus, le GHNE (groupement hospitalier nord Essonne), dont dépend la structure, indique que le patient peut être maintenu mécaniquement si besoin avec une prescription médicale, et explique que quatre personnes se trouvent dans l’ambulance ».
Nolwenn Cosson poursuit : « Concernant les équipements, la dernière visite de l’ARS «n’a révélé aucune carence particulière». Néanmoins, en réponse aux alertes des soignants, une visite est prévue ».
Teim Ghanem, chef de pôle psychiatrie du GHNE, précise que « certains travaux ont pris du retard, c’est fait lentement mais c’est fait. Pour les chambres d’apaisement, un projet pour améliorer les choses existe, les travaux seront réalisés cette année. Et concernant les brancards, une sorte de rampe pourrait être installée ».
« Cannabis : la consommation de CBD peut altérer l’efficacité des médicaments »
Date de publication : 12 mars 2025


Le Figaro note en effet : « Tisanes, bonbons, gâteaux, e-liquides pour cigarette électronique au CBD : consommer ces produits à base de dérivés du cannabis pendant un traitement peut réduire l’efficacité ou augmenter les effets indésirables d’un grand nombre de médicaments, avertissent [… les autorités sanitaires ».
Le journal indique que « vendu depuis 2015 sous différentes formes et consommé pour ses «effets réels ou supposés sur le bien-être des personnes», le CBD «n’est pas un médicament», rappelle […] l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) ».
Le quotidien relève que l’agence « appelle à la vigilance, au vu de 58 cas d’interactions avec des médicaments recensés par les centres antipoison entre 2017 et 2023 et 4 cas graves (un nombre «sans doute fortement sous-évalué») identifiés par le réseau de pharmacovigilance en 2021/2022 ».
Le Figaro souligne ainsi que « des interactions ont été constatées avec 17 familles de médicaments, dont les analgésiques, anticoagulants, antidiabétiques, antibiotiques, antifongiques, antidépresseurs, antiépileptiques, antipsychotiques, hypnotiques, benzodiazépines et méthadone. Mais le CBD est susceptible d’interagir avec d’autres types de médicaments «pas encore identifiés», précise l’agence du médicament ».
Le quotidien ajoute que « l’ANSM demande par ailleurs aux personnes sous traitement médicamenteux et qui utilisent ou envisagent d’utiliser des produits contenant du CBD, même ceux en vente libre, de le signaler à leur médecin, qui en tiendra compte dans sa prescription ».
Le journal note de plus qu’« en cas de «nausées, diarrhées, vertiges, somnolence, fatigue, maux de tête, idées et comportements suicidaires, crises d’épilepsie» après la consommation d’un produit contenant du CBD, il convient d’arrêter d’en consommer et de consulter son médecin ».
Le Parisien indique également que « le CBD peut réduire l’efficacité des médicaments ou augmenter leurs effets indésirables », relevant que l’ANSM « appelle à la vigilance ».
Le quotidien précise que « ces effets peuvent se produire quelle que soit la forme du CBD consommé (bonbons, gâteaux, tisanes…), après quelques heures comme plusieurs mois de consommation, et quelle que soit la fréquence de cette dernière ».
« Une trace héréditaire dans les spermatozoïdes des pères maltraités durant leur enfance »
Date de publication : 13 mars 2025

Pierre Kaldy observe dans Le Figaro qu’« une enfance traumatique peut affecter le développement et la santé d’une personne. Mais elle impacte aussi son héritage biologique, montre une récente étude finlandaise ».
Le journaliste explique qu’« en 2020, les chercheurs de l’université de Turku avaient déjà constaté, chez 72 couples et leur nourrisson, que le cerveau des bébés dont le père avait été maltraité durant l’enfance présentait une légère différence de développement, proportionnelle au degré de maltraitance subie par le père ».
Pierre Kaldy indique que « l’analyse épigénétique du sperme de ces pères, publiée en début d’année dans la revue Molecular Psychiatry, a été instructive : elle a révélé que les spermatozoïdes portaient des modifications du «profil de méthylation» de leur ADN, une marque réversible affectant l’expression des gènes ».
Il ajoute que « les spermatozoïdes de ces pères maltraités dans l’enfance présentaient aussi des différences dans leur contenu en ARN, des molécules produites à partir de l’ADN qui contribuent au développement de l’organisme après la fécondation ».
Pierre Kaldy relève donc qu’« une autre forme d’hérédité que celle liée à la séquence de l’ADN commence ainsi à émerger. Ce type de découvertes fait tomber un vieux dogme, celui de la « barrière de Weismann », selon lequel ces cellules reproductrices et leur matériel génétique seraient à l’abri des modifications physiologiques vécues par l’individu ».
Isabelle Mansuy, à la tête d’un laboratoire d’études sur le sujet à l’Université de Zürich et à l’École polytechnique fédérale de Zürich (Suisse), note que « cette hypothèse du XIXe siècle n’a jamais été démontrée, et l’on sait maintenant que les spermatozoïdes reçoivent de nombreuses informations moléculaires liées à l’état de l’organisme au moment de leur production ».
Le journaliste explique que « parmi ces nombreuses « mises à jour » du patrimoine épigénétique se trouvent les ARN, de petites séquences transcrites à partir de l’ADN qui peuvent coder ou réguler l’expression de protéines nécessaires au développement et au fonctionnement de l’organisme ».
Pierre Kaldy retient que « dans l’étude finlandaise, l’un de ces ARN s’est avéré en quantité plus faible dans le sperme des hommes maltraités durant leur enfance. Ce changement a aussi été retrouvé par Larry Feig et son équipe à l’université Tufts de Boston, aux États-Unis, chez des hommes soumis à un stress sévère dans leur enfance, ainsi que chez des jeunes souris mâles stressées par une instabilité sociale répétée ».
Le journaliste précise que « dans l’expérience chez les animaux, cet effet subsiste sur plusieurs générations et s’accompagne chez les femelles de signes d’anxiété et d’une sociabilité perturbée. Ces symptômes peuvent néanmoins être corrigés en apportant l’ARN en partie déficient aux ovules après leur fécondation ».
Isabelle Mansuy souligne : « Là encore, ce travail doit être reproduit, mais il est vrai que le stress peut modifier le fonctionnement de toutes les cellules du corps, et donc le contenu de leurs vésicules extracellulaires ».
La chercheuse remarque que « les modifications épigénétiques des spermatozoïdes responsables de ces effets sur la descendance ne semblent pas irréversibles ».
Pierre Kaldy indique que « dans le cas du stress, son équipe a montré qu’elles peuvent être corrigées chez la souris en plaçant les mâles traumatisés dans un milieu enrichi en activité, ce qui stimule leurs fonctions physiques et cérébrales ».
« Chez l’être humain, d’autres activités telles que la psychothérapie ou l’exercice physique régulier pourraient aussi réduire les marques épigénétiques du stress sur l’organisme, cellules reproductrices comprises », continue le journaliste.
« Santé mentale : « C’est comme si les adolescents avaient acquis l’idée qu’il est normal de ne pas aller bien » »
Date de publication : 14 mars 2025

Sylvain Mouillard remarque dans Libération que « c’est un sombre tableau que celui dressé par le baromètre du moral des adolescents. Réalisé par Notre avenir à tous, entreprise à impact engagée sur les questions de jeunesse, il montre, pour sa quatrième édition, une inquiétante stagnation du phénomène de mal-être psychologique chez les jeunes adolescents français, âgés de 11 à 15 ans ».
Le journaliste constate en effet que « 25% des sondés font l’objet d’une suspicion d’un trouble anxieux généralisé, tandis que 45% sont touchés par des troubles de l’anxiété ».
Dans un entretien, Hélène Roques, fondatrice de Notre avenir à tous, explique : « J’ai décidé de créer ce baromètre en 2021, après le Covid, pour mesurer le mal-être chez les jeunes adolescents, une tranche d’âge qui ne va plus chez le pédiatre mais ne verbalise pas forcément quand elle ne va pas bien ».
« Quand on publie nos premiers résultats, en 2021, on se dit qu’ils ne sont pas surprenants, puisqu’on vient de traverser les confinements. Mais ce qui est inquiétant, c’est que les indicateurs perdurent à un niveau élevé. Il y a une prise de conscience de l’importante du phénomène, c’est indéniable : on a même fait de la santé mentale une grande cause nationale. Mais le souci, c’est que les pouvoirs publics ne vont pas au bout de la démarche », ajoute la responsable.
Hélène Roques souligne qu’« un élément très fort ressort de l’enquête : le sentiment de fatigue atteint son plus haut niveau historique depuis 2021, à 72%, en hausse de 4 points par rapport à 2023. Mais rien n’est réellement fait pour agir sur le volume d’heures de cours, les classes surchargées, la pression de la notation ».
« Au final, c’est comme si les adolescents avaient acquis l’idée qu’il est normal de ne pas aller bien. Ils considèrent que ce n’est pas si grave et en parlent peu. Ni aux adultes, à leurs parents, ou à leurs camarades, parce que ça ne se fait pas de dire qu’on va mal », note la responsable.
Sylvain Mouillard interroge en outre : « Vous avez évoqué la question des rythmes scolaires. Est-ce que vous identifiez d’autres causes structurelles à ce mal-être ? ».
Hélène Roques répond qu’« en 2021, ce qui stressait le plus les adolescents interrogés, c’était l’état de la planète et de la nature, et les violences faites aux enfants – 54% des personnes citaient ces deux sujets. En 2024, les violences aux enfants sont toujours en tête (44%) mais la situation du monde, les guerres, apparaissent en deuxième position, à 41% ».
« La pénurie d’un « « La situation est très dangereuse » : déserts médicaux, les psychiatres aussi ! »
Date de publication : 25 mars 2025

Nicolas Berrod annonce dans Le Parisien que « près de la moitié des Français ayant eu des problèmes de santé mentale se plaignent de délais d’attente trop longs voire de l’impossibilité de prendre rendez-vous avec un psychiatre, d’après une enquête Ipsos pour la Fédération hospitalière de France (FHF) ».
Le journaliste souligne qu’« au final, seuls 7 sur 10 bénéficient d’une prise en charge par un professionnel. Le plus souvent, il s’agit d’un généraliste. Moins d’un quart voient un psychiatre ».
Arnaud Robinet, président de la FHF, déclare ainsi qu’« en psychiatrie plus qu’ailleurs, hôpitaux, centres de santé et médecins sont débordés ».
Antoine Pelissolo, chef du service de psychiatrie à l’hôpital Henri-Mondor (Créteil), observe quant à lui : « Quand on se compare aux pays voisins, la France n’a pas vraiment moins de praticiens. Mais ils sont souvent âgés et on a un gros problème de répartition géographique : dès que l’on s’éloigne des grandes villes, cela devient très compliqué ».
Nicolas Berrod relève que « d’après le dernier rapport de l’Ordre des médecins, la France compte 15 psychiatres pour 100.000 habitants. C’est beaucoup moins dans certains départements ruraux, comme la Creuse, où le nombre de praticiens a été divisé par deux en dix ans ».
« Et là où il y a le moins de spécialistes, ces derniers sont les plus âgés. Ainsi, au fil des départs à la retraite ces prochaines années, la situation risque encore d’empirer », poursuit le journaliste.
Nicolas Berrod ajoute que « la situation est aggravée par deux autres phénomènes, liés à l’argent. Certains praticiens se mettent à proposer des séances de psychothérapies, souvent plus rémunératrices, de même que des dermatologues se tournent vers l’esthétique. D’autres profitent du fait que la demande dépasse largement l’offre pour proposer des séances très chères, inaccessibles pour une grande partie des Français ».
Il observe en outre que « la situation n’est pas vraiment meilleure à l’hôpital, surtout hors des plus grandes villes. (…) Une précédente enquête de la FHF montrait que dans 40% des établissements publics, un quart des postes n’étaient pas pourvus ».
Rachel Bocher, cheffe du service de psychiatrie au CHU de Nantes, déclare que « même les psychiatres vont finir par craquer, la situation est très dangereuse ! ».
Le journaliste explique que « de nombreux établissements font appel à des diplômés en dehors de l’Union européenne, les « Padhue ». Au CHU de Nantes, le service en compte deux parmi ses 18 psychiatres. Mais ils n’ont pas toujours le même niveau de formation que leurs collègues sortis des universités françaises ».
Nicolas Berrod note que « l’un des problèmes se trouve d’ailleurs à ce niveau, car la psychiatrie est l’une des spécialités médicales les moins choisies par les étudiants ».
Le journaliste indique que « les différents gouvernements assurent être conscients de la crise de la psychiatrie. Lancée en juin 2018, une «feuille de route» a été enrichie, en 2021, par des assises. Elle est basée sur trois piliers : renforcer la prévention pour limiter le risque de problèmes psy, assurer une offre «accessible, diversifiée et de qualité», et enfin «améliorer les conditions de vie» des personnes souffrantes ».
« Parmi les mesures applicables rapidement, les psychiatres interrogés plaident notamment pour revaloriser les professionnels du secteur, en particulier les non-médecins qui sont tout aussi indispensables : infirmières, psychologues, aides-soignants, psychomotriciens, etc. », continue Nicolas Berrod.
antipsychotique majeur persiste et met en alerte patients, psychiatres et pharmaciens »
Date de publication : 14 mars 2025

Mattea Battaglia et Pascale Santi notent en effet dans Le Monde que « l’Agence nationale de sécurité du médicament a reconnu, le 10 mars, de «fortes tensions d’approvisionnement» concernant la quétiapine, un traitement prescrit à 250.000 patients en 2024, atteints de troubles bipolaires ou de schizophrénie ».
Les journalistes indiquent que « les pénuries affectent dorénavant «60% du marché français», a fait savoir l’Agence du médicament. (…) «On fait face à une vraie absence de visibilité» et à «de grosses incertitudes» concernant sa remise à disposition, explique Pierre-Olivier Farenq, directeur du centre d’appui des situations à risque de l’agence ».
Mattea Battaglia et Pascale Santi expliquent que ce médicament « est largement produit par une entreprise grecque, Pharmathen International, à l’arrêt depuis le repérage, au cours de l’été 2024, de «non-conformité par les autorités grecques». Pharmathen produit la molécule pour 12 laboratoires qui la commercialisent, dont 7, à ce jour, ne peuvent plus réapprovisionner le marché ».
Les journalistes rappellent que « les premières alertes sont remontées du terrain dès septembre 2024 et les tensions se sont aggravées en fin d’année. Le 30 janvier, l’ANSM a annoncé une série de mesures, dont la restriction des prescriptions, avec recommandation de ne pas entreprendre ce traitement pour d’autres pathologies que les troubles bipolaires ».
Elles poursuivent : « Une autre étape a été franchie le 13 février, avec l’autorisation accordée aux pharmacies de dispenser le traitement «à l’unité» et d’effectuer, dans un cadre donné, des «préparations magistrales» – celles-ci sont fabriquées sur mesure dans certaines officines, une quarantaine sur tout le territoire ».
« Cette possibilité ne concerne cependant que la quétiapine à libération immédiate et pas le produit à libération prolongée – qui est pourtant la formule actuelle. Depuis le 10 mars, trois dosages sont concernés (50 milligrammes, 100 milligrammes, et 150 milligrammes) », précisent Mattea Battaglia et Pascale Santi.
Les journalistes notent ainsi qu’« en pharmacie, la situation tend à s’aggraver ». Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France, déclare que « la plupart des 20.000 officines sont concernées aujourd’hui, certaines n’ont déjà plus rien ».
Mattea Battaglia et Pascale Santi ajoutent que « les alertes résonnent aussi dans les rangs des psychiatres. Antoine Pelissolo, chef de service à l’hôpital Henri-Mondor de Créteil, a tiré la sonnette d’alarme dans une tribune au Point le 30 janvier. Son titre : «La pénurie d’un antipsychotique majeur met en danger 200.000 patients» ».
Le médecin relève qu’« en principe, tout changement de traitement est anticipé et préparé dans le dialogue avec le patient. Là, on improvise ».
Les journalistes notent que « priorisées par l’ANSM, les pharmacies hospitalières sont, pour l’heure, préservées. Et des patients, après avoir fait la tournée des pharmacies, viennent solliciter les hôpitaux ».
« Si les professionnels de santé rappellent les risques à interrompre brutalement ce type de traitement, ils n’ont pas connaissance, à ce stade, de patients qui «décompensent» », continuent Mattea Battaglia et Pascale Santi.
La Dr Noémie Ayache, coordinatrice du SAMU psy 93 aux urgences de Bobigny, précise que « cela ne se mesure pas avant 6 semaines au moins ».
Mattea Battaglia et Pascale Santi indiquent qu’« une réunion est prévue (au ministère de la Santé) mardi 18 mars ».
« Et si les larmes pouvaient réduire l’agressivité ? »
Date de publication : 18 mars 2025

Aurore Braconnier s’interroge dans Sciences et Avenir : « Et si les larmes pouvaient réduire l’agressivité ? Voilà la question que se sont posée des neurobiologistes de l’institut Weizmann de Rehovot, en Israël, fin 2023 ».
La journaliste explique que « chez l’humain, on différencie trois types de larmes : réflexes (qui servent à éliminer les substances nuisibles comme la fumée), basales (qui lubrifient l’œil, comme Charles Darwin le mentionnait) et émotionnelles (celles liées à la tristesse ou la joie). C’est à ces dernières, caractérisées par une forte teneur en protéines, hormones et toxines que se sont intéressés les chercheurs israéliens ».
Aurore Braconnier note qu’« en 2011 déjà, ils avaient montré dans la revue Science que ce type de larmes féminines pouvait induire une baisse du taux de testostérone chez les hommes. Pour en savoir plus sur leur possible impact sur l’agressivité, ils ont invité des femmes à visionner des films tristes afin de collecter leurs larmes dans des petits tubes à essai ».
« Ils ont ensuite demandé à un groupe de 31 hommes de humer ces tubes à essai, leur faisant croire qu’ils étudiaient les odeurs subliminales. Parallèlement, un autre groupe témoin reniflait de l’eau salée », explique la journaliste.
Elle indique que « tous devaient ensuite participer à des jeux impliquant des échanges monétaires au cours desquels les chercheurs ont observé que plus on retirait d’argent à un participant, plus son comportement devenait agressif. Or, selon les résultats parus dans Plos Biology, les hommes qui avaient humé les larmes des femmes se montraient 44% moins agressifs que les autres ! ».
Aurore Braconnier relève que « les chercheurs ont ensuite versé du liquide lacrymal sur différentes cellules en culture. Ils ont alors observé que 4 récepteurs olfactifs réagissent à la présence des larmes, bien que ces dernières soient inodores. Cela laisse supposer qu’un ou plusieurs composés chimiques présents dans ce liquide lacrymal influencent les récepteurs des odeurs dans le nez des hommes ».
La journaliste continue : « Les chercheurs ont analysé le cerveau des hommes avec l’aide d’un scanner IRM pendant qu’ils sentaient les larmes. Ils se sont aperçus alors que deux zones connues pour être impliquées dans les comportements agressifs se mettaient à communiquer : l’insula antérieure et l’amygdale. Or, plus elles communiquaient, moins les joueurs cherchaient à se venger de leurs pertes ».
Noam Sobel, qui a mené ce travail, remarque ainsi que « ces résultats suggèrent que les larmes sont une couverture chimique offrant une protection contre l’agression. De plus, cet effet est commun aux rongeurs et aux humains, et peut-être aussi à d’autres mammifères ».
Aurore Braconnier s’interroge : « Les larmes masculines ont-elles le même pouvoir apaisant que les féminines ? Rien n’est moins sûr car il arrive qu’une même molécule chimique génère un comportement diamétralement opposé selon les sexes ».
La journaliste conclut : « Une hypothèse est qu’il s’agirait d’un mécanisme de survie incitant les pères à ne pas attaquer leur bébé et les mères à le défendre. Mais pour les larmes masculines, impossible de répondre… faute de participants aux études ! ».
« Les bébés créent-ils des souvenirs de ce qu’ils ont vécu ? »
Date de publication : 21 mars 2025

Marie Parra note dans Sciences et Avenir que « jusqu’à présent, on pensait que l’encodage des souvenirs n’était pas efficace chez les bébés. En particulier pour les souvenirs de la mémoire épisodique, les moments personnellement vécus. Mais des chercheurs américains viennent de révéler la capacité des jeunes enfants à enregistrer ces événements, alors pourquoi ne se rappelle-t-on pas ses premières années ? ».
La journaliste note ainsi qu’« on se souvient très rarement de ce qui concerne les premières années de sa vie… Ce phénomène a même un nom : l’amnésie infantile. La mémoire épisodique, celle qui touche aux événements personnellement vécus, des bébés est-elle défaillante pour autant ? Des chercheurs de l’Université Yale (Etats-Unis) ont tranché, grâce à une étude basée sur les IRM d’enfants », parue dans Science.
Marie Parra explique : « Le constat de l’amnésie infantile a amené les scientifiques à se questionner sur le développement d’une région cérébrale essentielle à la mémoire épisodique : l’hippocampe. (…) L’hippocampe n’est-il pas complètement opérationnel chez les bébés ? Le stockage serait-il déficient ? ».
Nick Turk-Browne, chercheur en neurosciences à l’Université Yale, remarque que « des études sur le rongeur ont montré que les jeunes souris sont capables de former des souvenirs dans l’hippocampe dès leur plus jeune âge ».
La journaliste poursuit : « Plus étonnant encore, les traces de cette mémorisation, on parle d’engrammes – la manifestation physique des souvenirs -, persistent même après la maturité des individus, et peuvent être réactivées artificiellement. Et si les souvenirs s’encodaient correctement aussi chez les bébés ? C’est ce que l’équipe de Nick Turk-Browne a réussi à démontrer ».
Ce dernier indique ainsi : « Nos travaux montrent que les souvenirs épisodiques peuvent bien se former dans l’hippocampe du nourrisson ! ».
Marie Parra relève que « puisque les souvenirs s’encodent dans l’hippocampe dès 12 mois, les chercheurs émettent l’hypothèse que c’est la récupération du souvenir qui serait défaillante ».
Nick Turk-Browne fait savoir : « On pense que l’hippocampe ne reçoit pas les bonnes informations pour faire remonter les vieux souvenirs, peut-être en raison de changements dans la manière dont le cerveau traite les expériences sensorielles ».
La journaliste remarque que « le système sensoriel évolue vite, et pourrait ainsi traiter des événements similaires de manière tout à fait différente chez les bébés. En d’autres termes, avec le temps, l’hippocampe finirait par ne plus recevoir les bons « mots-clés » pour retrouver ces souvenirs ».
Marie Parra conclout que « l’équipe de l’université Yale travaille sur le suivi des souvenirs chez les jeunes enfants, de 2 à 3 ans, et espère même pouvoir continuer à les suivre plus longtemps, jusqu’à leurs 9 ans, afin d’éclairer les mécanismes en jeu dans l’amnésie infantile ».
« « Certains nous appellent, cachés dans les toilettes, car ils n’osent pas retourner en stage » : 93% des étudiants infirmiers sont épuisés mentalement »
Date de publication : 27 mars 2025

Pauline Bluteau indique dans Le Parisien que « dans son enquête, menée entre novembre et février derniers auprès de 16.000 étudiants, la Fédération nationale des étudiants en sciences infirmières (Fnesi) pointe la « santé dégradée » des étudiants ».
La journaliste constate que « près des trois quarts affirment que leur santé mentale s’est détériorée depuis le début de la formation, contre 61% en 2022. Un point commun à ce sentiment : les conditions de stage qui amènent certains étudiants à arrêter leur formation et/ou à penser au suicide ».
Ilona Denis, présidente de la Fnesi, déclare ainsi : « On a eu une montée des sollicitations sur notre plateforme depuis janvier : certains nous ont appelés, cachés dans les toilettes, avec la peur de retourner dans leur service ».
Pauline Bluteau explique qu’« à la fois épuisés physiquement (un sur deux) et mentalement (93%), 70% des étudiants infirmiers affirment avoir déjà pensé à arrêter leur formation, contre 59% en 2022. Une tendance qui se confirme aussi dans les chiffres de la DREES puisque près de 15% des étudiants interrompent bel et bien leur formation chaque année. La cause principale est connue, les conditions de stage sont dénoncées par deux étudiants infirmiers sur cinq ».
La journaliste ajoute : « S’ils se font de plus en plus accompagner par des psychologues (38% en 2025 contre 23% en 2022), les conditions de formation «ne sont plus vivables» pour les étudiants : 31% prennent des traitements et consomment notamment des anxiolytiques, des antidépresseurs et hypnotiques. Pire, 20% disent avoir déjà eu des idées suicidaires et un étudiant sur dix a tenté de se suicider ».
Pauline Bluteau relève en outre que « 61% des étudiants le confirment : ils ne sont pas ou moyennement écoutés quand ils font remonter ces problématiques. Le système de santé, déjà sous tension, laisse peu de place à la compréhension, y compris du côté des IFSI (Instituts de formation en soins infirmiers), pourtant parmi les premiers alertés par les étudiants ».
Ilona Denis déclare que « les formateurs sont pris en étau : croire l’étudiant ou le service, mais dans ce contexte, on privilégie le service. (…) Avec l’augmentation des quotas, il n’y a plus assez de terrains de stage pour les étudiants et les conditions se dégradent ».
Pauline Bluteau indique que « d’après l’enquête de la Fnesi, 39% des étudiants se retrouvent en stage avec plusieurs étudiants infirmiers, de quoi limiter l’accompagnement personnalisé. Car ils sont aussi 7,5% à déclarer ne pas avoir eu de tuteur lors de leur dernier stage ».
La journaliste souligne en outre que « comme en médecine, les terrains de stage sont aussi le théâtre de violences. Un étudiant sur dix estime avoir été discriminé et 16% se disent avoir été victimes de violences sexistes ou sexuelles pendant leur formation. Le plus souvent (53%), les agressions sont commises par un professionnel de santé, voire par le tuteur du stage (9%) ».
« Trop de personnes diagnostiquées dépressives sont des bipolaires qui s’ignorent »
Date de publication : 28 mars 2025

A l’occasion de la Journée mondiale des troubles bipolaires, Cécile Thibert note ainsi que « ce sont deux maladies en apparence si semblables qu’il est très difficile de les différencier. Et pourtant, cette confusion peut être dramatique pour les patients ».
Le Pr Raoul Belzeaux, psychiatre au CHU de Montpellier, rappelle que « de très nombreuses études montrent que soigner les troubles bipolaires avec un antidépresseur seul aggrave la maladie, augmente la fréquence des rechutes et le risque suicidaire ».
La journaliste souligne en effet : « Les études montrent que 10 à 40% des patients diagnostiqués pour une dépression souffriraient en réalité de troubles bipolaires ».
Le Pr Belzeaux réagit : « Malheureusement, nous sommes assez démunis pour réaliser ce diagnostic, il n’existe pas de test sanguin ou d’examen d’imagerie ayant fait ses preuves ».
Cécile Thibert explique qu’« à l’heure actuelle, dépister les troubles bipolaires passe par «un bilan clinique où l’on échange longuement avec le patient sur son parcours», ajoute le médecin, qui précise que plusieurs heures sont nécessaires. Un «luxe» que peuvent se permettre les 9 Centres Experts dédiés aux troubles bipolaires en France, mais pas les médecins généralistes, qui sont en outre moins formés ».
Le Pr Belzeaux souligne que « les trois quarts des patients qui souffrent de dépression ne verront jamais de psychiatre, uniquement leur médecin traitant ».
« Pas étonnant donc que nombre de personnes bipolaires passent entre les mailles du filet : sept à dix ans en moyenne s’écoulent entre les premiers signes de la maladie et la mise en place d’un traitement adapté », continue la journaliste.
Elle remarque qu’« il ne faut pas s’avouer vaincu pour autant, car les troubles bipolaires sèment des indices. Le premier est l’âge d’apparition des premiers symptômes, généralement entre 15 et 25 ans. Si cette maladie est très hétérogène, certains signes sont assez évocateurs. Elle commence généralement par un épisode dépressif. À partir de là, il faut guetter l’éventuelle apparition d’une phase dite « maniaque », caractérisée par une exaltation de l’humeur ».
Cécile Thibert ajoute : « Autre indice : l’existence de cas dans la famille. (…) Les personnes bipolaires sont plus vulnérables vis-à-vis des addictions. (…) Parmi les indicateurs qui font pencher le curseur en direction des troubles bipolaires, il y a aussi la réaction du patient au traitement ».
Le Pr Belzeaux précise que « lorsque les antidépresseurs ne fonctionnent pas ou qu’ils fonctionnent trop bien, c’est-à-dire qu’ils semblent prendre effet en quelques jours, c’est un signal fort, même si cela ne suffit pas à poser le diagnostic ».
La journaliste note qu’« avec son équipe, le médecin œuvre à la mise au point d’un test qui pourrait orienter le diagnostic en seulement une prise de sang ».